Les opérateurs télécoms investissent le marché de la cybersécurité

497

Au tour d’Iliad de se lancer dans la cybersécurité: à travers leurs filiales dédiées aux entreprises, les opérateurs télécoms français investissent ce marché porteur, alors que les menaces s’intensifient, aussi bien contre que les acteurs économiques que les collectivités locales. A la veille de l’ouverture du Forum international de la cybersécurité (FIC) à Lille, la maison mère de l’opérateur Free a officialisé mardi le lancement de ses solutions de cybersécurité «à destination des PME, des ETI, des grands comptes et des organisations publiques», en association avec la startup française spécialisée ITrust, qui revendique plus de 400 clients dans le monde. Iliad espère que les solutions de cybersécurité représenteront dans deux ou trois ans au moins 10% de son chiffre d’affaires entreprises (attendu à 400 à 500 millions d’euros «début 2025»), soit 40 à 50 millions d’euros.Pourquoi investir une telle activité, au-delà de son coeur de métier, les services télécoms comme l’accès à internet ou encore la fourniture de services «cloud» (l’informatique en nuage) ? «On savait qu’il nous manquait une brique, la cybersécurité, parce qu’il y a un lien entre ces trois activités», a souligné Thomas Reynaud, directeur général d’Iliad, lors d’une conférence de presse mardi. A l’image de la ville de Lille qui a reconnu le 1er mars un vol important de données personnelles, notamment de ses agents, avec demande de rançon, les collectivités ou les hôpitaux sont, en plus des entreprises, des cibles de choix pour les cybercriminels. La société de cybersécurité Trend Micro a par exemple détecté 4 millions de menaces par rançongiciel au 3e trimestre 2022, en hausse de 22% sur un an. Si les grandes entreprises sont averties depuis longtemps du risque cyber, il y a aussi une prise de conscience croissante des moyennes et petites entreprises, alors que près d’une PME sur deux qui a perdu ses données fait faillite dans les 12 mois, selon l’assureur Hiscox. Pour les opérateurs télécoms, «il y a en tout cas une place à prendre» sur ce marché et «ils sont tout à fait légitimes» pour y aller et vendre des accès à internet «sécurisés», explique Sylvain Chevallier, spécialiste en télécoms et associé du cabinet de conseil Bearing Point. La cybersécurité, marché en pleine expansion qui doit atteindre 267 milliards de dollars en 2026 contre 172 milliards en 2022 selon le cabinet Gartner, constitue un «relais de croissance» bienvenu, alors que leurs activités «historiques» (voix, accès à internet…) sont sous «très forte pression», ajoute-t-il. «De plus en plus, les opérateurs vont commercialiser, non pas un accès à internet +nu+, mais un accès avec des services autour, avec la cybersécurité au premier chef. C’est un peu comme les billets d’avion: soit on prend un billet (simple), soit on prend un billet avec un bagage et une réservation de siège», souligne encore Sylvain Chevallier. Dans le secteur de la cybersécurité, Orange, déjà ultra-dominant sur le marché entreprises télécoms français, entend devenir «un leader» en Europe. L’entreprise vise un chiffre d’affaires de «1,3 milliard d’euros» d’ici 2025 sur cette activité.Malgré le poids dominant d’Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free multiplient les offensives pour essayer de se tailler une part dans ce segment stratégique et profitable. Fin janvier, SFR a par exemple décroché un contrat avec l’UGAP, centrale d’achat dédiée au secteur public, pour fournir des «solutions et prestations de cybersécurité» à destination des collectivités territoriales, administrations et établissements publics de l’Etat, ainsi que le secteur social et les établissements publics de santé, dont la valeur est estimée à 170 millions d’euros. Parmi les opérateurs télécoms, Orange est le seul à s’être hissé dans le club des entreprises leaders de la cybersécurité en France sur le marché des entreprises, aux côtés de grands groupes informatiques comme Thales, Atos, Capgemini, IBM, Sopra Steria et Airbus Group.