Les sociétés chinoises cotées à Wall Street dévissent en Bourse

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Frappées par un tour de vis réglementaire dans leur pays, les sociétés chinoises cotées à Wall Street dévissent en Bourse, boudées par certains investisseurs échaudés, dans un climat géopolitique incertain. Le titre du «Uber chinois» Didi Chuxing a abandonné mardi 18,9%, plombé par une série d’annonces de l’Autorité chinoise de surveillance de la cybersécurité, qui a successivement ouvert une enquête, interdit à la société d’accepter de nouveaux utilisateurs et sommé les plateformes d’applications de retirer Didi de leur offre. Deux autres groupes chinois cotés à Wall Street, Full Truck Alliance (fret et réservation de camions) et Kanzhun (recherche d’emploi), eux aussi objet d’une enquête du régulateur national, ont perdu respectivement mardi 6,4% et 15,9%. «Le risque réglementaire en Chine est une réalité», a commenté Nicholas Borst, responsable de la recherche sur la Chine pour la société d’investissement Seafarer Capital Partners. «Et je pense que les investisseurs commencent à prendre ça en compte». L’histoire des sociétés chinoises à Wall Street a vraiment commencé en septembre 2014 avec la cotation du géant du commerce en ligne Alibaba. Les investissements directs de capitaux étrangers au capital de ces entreprises étant interdits par le gouvernement chinois, les prétendants recourent à un double mécanisme complexe, appelé VIE côté chinois et ADR (ou ADS) côté américain, pour entrer à Wall Street et lever des capitaux. En 2020, les sociétés chinoises ont levé quelque 11,7 milliards de dollars aux Etats-Unis, selon Renaissance Capital.Mais après avoir longtemps laissé la bride sur le cou à ses fleurons de la tech, le gouvernement chinois a mis le holà en 2020, en commençant par Alibaba, objet d’une enquête anti-monopole. «Les régulateurs chinois ont pris d’un coup conscience que ces entreprises étaient grandes, tentaculaires, présentes dans plusieurs secteurs», analyse Nicholas Borst. «La priorité est cette industrie (de la tech) dont ils ont l’impression qu’elle est hors de contrôle». «Et je ne pense pas que les intérêts des actionnaires, en particulier des actionnaires étrangers, soient bien hauts dans la liste de leurs priorités», conclut-il. Reste, en toile de fond, la relation complexe entre Chine et Etats-Unis avec, pour enjeu majeur, la technologie, domaine dans lequel chacun des deux pays essaye de s’octroyer un avantage. En mai, la Bourse du New York Stock Exchange (NYSE) a sorti de la cote 3 groupes chinois, se conformant à un décret du président Donald Trump qui interdisait d’investir dans des entreprises accusées de collaborer avec l’armée chinoise. Nicholas Borst rappelle néanmoins que beaucoup avaient prédit un assèchement des introductions de valeurs chinoises à Wall Street sous l’ère Trump. Mais «cela ne s’est pas produit», bien au contraire, souligne-t-il. L’alourdissement des contraintes réglementaires, côté chinois comme américain, devrait ralentir l’arrivée de nouvelles entités chinoises sur les marchés américains, prédit Winston Ma, professeur à l’université NYU de New York. «Il faut attendre de voir jusqu’où ira ce virage réglementaire», dit-il. Depuis fin février, les entreprises chinoises cotées aux Etats-Unis se sont nettement repliées en valeur, Alibaba perdant un tiers de sa capitalisation. «Les investisseurs tirent d’abord et posent des questions après», observe Brendan Ahern, responsable de l’investissement au sein de la société KraneShares. Pour autant, cette réaction est «exagérée» au regard de la santé de ces entreprises, fait-il valoir, estimant que «ces sociétés sont très peu chères» comparées à d’autres entreprises équivalentes. En outre, le plus souvent, «la régulation fait beaucoup de bruit mais elle n’a pas vraiment d’impact sur l’activité économique» de ces groupes, tempère-t-il.