Même chez les start-up vedettes du nouvel âge numérique, bien adaptées par nature au travail à distance, le télétravail à haute dose doit être pris avec précaution, assurent plusieurs dirigeants de pépites de la French tech.Vendredi, au lendemain de l’annonce d’un 3ème confinement ou pseudo-confinement par le gouvernement, Oodrive, vedette française du stockage et du partage de document sécurisé – un des outils de base du télétravail – a mis en garde contre les effets potentiellement délétères d’un «stop-and-go» du travail à distance. Il ne faudrait pas que ce 3ème retour aux bureaux vides «dure trop longtemps» au risque de «perdre tous les gains qui ont été faits» cette année en termes de méthode de travail, d’adéquation à de nouvelles aspirations des salariés, a expliqué Stéphane Ankaoua, le DG chargé des opérations de cette entreprise de 400 salariés. Tout au long de cette année exceptionnelle, qui l’a vu passer d’un taux de télétravail de 6% avant la crise à 95% au début du 1er confinement, Oodrive a constaté dans son propre fonctionnement les limites d’un télétravail trop étendu, a-t-il expliqué. Après un 1er confinement plutôt «prometteur (…) on a un peu déchanté avec la phase 2» à l’automne, a-t-il expliqué. «On a vu arriver les 1ères notions de souffrance, d’isolement», a-t-il poursuivi. «Pouvoir travailler, mais ne plus pouvoir rencontrer les gens devenait contreproductif» pour une entreprise très jeune, avec beaucoup de collaborateurs entre 25 et 30 ans, explique-t-il. Pour ce 3ème confinement, la direction a demandé au management intermédiaire de continuer à imposer des rendez-vous une fois par semaine dans les locaux de l’entreprise. Et ensuite, l’entreprise compte partir sur une base de deux jours de télétravail par semaine, adaptable suivant les situations. Chez Contentsquare (740 salariés), spécialiste du comportement des internautes, on revendique également le maintien d’un «modèle hybride», avec 2 jours de télétravail par semaine pour l’après-confinement – sans forcément s’interdire plus, jusqu’à 100% télétravail, pour certains cas particuliers. Sur un strict plan opérationnel, «on peut fonctionner à 100% en télétravail, sans aucun problème d’efficacité», explique Nicolas Fritz, directeur des opérations de cette société en hypercroissance qui est l’une des onze licornes françaises (jeune société tech valorisée à plus d’1 milliard d’euros). «Mais on a décidé de ré-ouvrir les bureaux après le 1er confinement parce que beaucoup de salariés nous ont appelés à l’aide», ne supportant plus le travail isolé «malgré les efforts et les dépenses que nous avons faits pour que ça se passe bien». L’entreprise n’est pas mûre pour un basculement généralisé dans le télétravail. Mathieu Beucher, patron de Klaxoon, autre vedette française de 250 personnes qui propose des outils de travail collaboratif, est lui un enthousiaste du télétravail, même s’il ne nie pas les efforts de ré-organisation qu’il implique. Un sondage interne à l’entreprise rennaise montre que les salariés privilégient en moyenne une formule à 3 jours de télétravail, explique-t-il. «Dès qu’elle arrive à fonctionner avec des collaborateurs à distance, l’entreprise s’ouvre beaucoup plus vers l’extérieur, vers de nouvelles opportunités», argumente-t-il. «On peut vendre partout dans le monde, recruter des personnes auxquelles on n’avait pas accès avant» du fait de la barrière géographique. Mais cela nécessite des changement «profonds» des méthodes de management, en obligeant par exemple à formaliser chaque jour des «rituels d’équipe» qui permettent «des temps de synchronisation» entre tous, reconnaît-il. Ce dialogue de toute façon «n’existe pas forcément tous les jours en présentiel, «où l’on confond souvent le fait d’avoir fait une réunion avec le fait d’avoir établi un dialogue», ironise-t-il
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