M. GIROUD (ACSEL) : « La majorité des Français (80%) sont favorables à mettre fin à l’anonymat sur les réseaux sociaux »

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La 11ème édition du Baromètre de la Confiance des Français dans le numérique est porteuse d’enseignements : les leviers de la confiance portent leurs fruits et confortent le besoin de protection pour certains usages comme l’IA et les réseaux sociaux. Rencontre avec Marie GIROUD, Directrice de la Think Factory ACSEL, l’association de l’économie numérique en charge du rapport. 

L’évolution de la confiance des Français dans le numérique va-t-elle dans le bon sens ?

Depuis 11 ans, nous atteignons un plafond de verre. 43% des Français déclarent avoir confiance dans le numérique en 2023 ; un chiffre au-dessus de la moyenne (41%) des huit dernières années. Cette confiance grimpe même, chez les 65 ans et plus, de 10 points en 1 an (47% vs 37% en 2022). C’est vraiment encourageant. En revanche, la confiance s’effrite chez les 35-49 ans, pourtant familiers du digital (46% vs 53% en 2022).

Une chose est certaine, les usages ne font qu’augmenter…

C’est exact ! Il y a des usages numériques très installés. Ce qui est nouveau cette année, c’est qu’il y a un sentiment de diminution de la fraude et de l’escroquerie en ligne (-6 points sur un an). Même s’ils sont encore 65% à estimer qu’elles sont de plus en plus fréquentes/ Les Français interrogés ne sont plus que 38% à déclarer avoir été victimes d’une escroquerie l’an dernier, soit 7 points de moins que lors du précédent baromètre. Et, si l’hameçonnage reste l’arnaque la plus répandue, elle a engendré des conséquences moins négatives en 2023 qu’en 2022 : 36% vs 41%. Il faut bien avoir en tête que le Baromètre est basé sur du déclaratif, il exprime le sentiment, le ressenti des Français sur la confiance numérique.

La baisse des escroqueries en ligne contribue-t-elle à modifier la perception de la sécurité numérique parmi les Français ? 

Oui, bien sûr ! Ce sentiment est renforcé parce que les Français se disent majoritairement bien informés des manières de se prémunir contre les escroqueries en ligne (61%, + 2 pts vs 2022). Ils ont à leur disposition un minimum de leviers. Et pour la première fois, le secteur de la banque amène plus de confiance que celle de l’État.

Pourquoi la banque devient le premier acteur de la confiance des Français en matière d’usage numérique ? 

On peut penser que les mesures prises par le secteur bancaire portent leurs fruits : authentification forte généralisée, campagnes massives de communication contre le phishing… Ainsi, 65% des Français estiment qu’il n’est pas risqué de consulter ses comptes bancaires en ligne. Une confiance significativement à la hausse auprès des 15-24 ans (+13 pts vs 2022, à 74%) et chez les 65 ans et plus (65%, soit 7 pts de plus qu’en 2022).

Vous notez aussi un vrai plébiscite à l’égard des nouvelles méthodes d’authentification…

On note effectivement un intérêt grandissant à l’égard des nouvelles méthodes d’authentification dans le cadre d’un paiement en ligne (SMS, code de sécurité, via l’application bancaire…) : 67% se sentent rassurés (+16 pts vs 2022), tandis que 69 % s’en déclarent satisfaits (+12 pts).

Face à la défiance vis-à-vis des réseaux sociaux, quelle pourrait être l’efficacité de l’implémentation d’une identité numérique vérifiée pour améliorer la confiance et la sécurité sur ces plateformes ?

 La majorité des Français (80%) sont favorables à mettre fin à l’anonymat sur les réseaux sociaux, estimant que le fait de rester anonyme favorise les comportements inappropriés. Ils voient dans la suppression de cet anonymat un moyen potentiel de restaurer la confiance dans ces plateformes. De plus, 87% des personnes interrogées sont pour la création d’une identité numérique vérifiée sur les réseaux sociaux, et 81% seraient d’accord pour que leur identité soit vérifiée.

Le manque de confiance sur les réseaux sociaux joue-t-il sur l’usage ? 

Seuls 40% des utilisateurs estiment qu’utiliser ces plateformes est peu voire pas du tout risqué (contre 38% de l’ensemble des personnes interrogées). Plus surprenant, la confiance des jeunes de 15 à 24 ans dans la capacité de ces réseaux à réguler efficacement leurs contenus (comme éviter les faux comptes et la propagation de fausses nouvelles, ou combattre le harcèlement en ligne) a diminué, passant de 51% en 2022 à 47%.

Quel rapport les jeunes entretiennent-ils avec les réseaux sociaux ? 

La confiance des jeunes dans les réseaux sociaux diminue, malgré le fait qu’ils soient traditionnellement perçus comme les utilisateurs les plus engagés. Cette tendance est similaire à celle observée avec les influenceurs, où l’on note une défiance croissante, probablement en raison des récents scandales les impliquant. Selon le baromètre, 69% des répondants affirment ne suivre aucun influenceur, ce qui représente une baisse de 4 points par rapport à 2022. Parmi les jeunes de 15 à 24 ans, cette proportion descend à 49%, indiquant une réduction de 21 points depuis l’année dernière.

Quelle est la perception de l’IA générative parmi les Français ? 

62% des personnes interrogées se montrent plus méfiantes à l’égard des contenus qu’elles rencontrent sur les réseaux sociaux, et cette méfiance s’étend également aux médias, concernant 53% des Français dû au recours croissant à croissant à IA Générative. Cette suspicion peut s’expliquer par le fait que plus de la moitié (55%) admettent ne pas être capables de distinguer un contenu créé par une intelligence artificielle. De plus, une très grande majorité de Français exprime le souhait que tout usage de l’IA dans la création d’images, de vidéos ou de textes soit clairement indiqué.