Mathieu Gallet : fin d’une carrière météoritique au sein de l’audiovisuel public

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Homme pressé et brillant, Mathieu Gallet, 41 ans, révoqué mercredi de la présidence de Radio France par le Conseil supérieur de l’audiovisuel, avait jusqu’ici connu une carrière météoritique au sein de l’audiovisuel public. Le CSA, l’instance même qui l’avait nommé en février 2014, a estimé que sa récente condamnation à un an de prison avec sursis et 20.000 euros d’amende pour des faits de «favoritisme» quand il dirigeait l’Institut national de l’audiovisuel (INA, 2010-2014), l’empêchait de diriger sereinement Radio France. Il y a quatre ans, le CSA avait notamment été séduit par son ambitieux projet numérique et avait créé la surprise en nommant à l’unanimité le jeune dirigeant à la présidence de Radio France, face à des postulants plus expérimentés. Depuis l’annonce de sa condamnation le 15 janvier, dont il a fait appel, Mathieu Gallet s’accrochait à son siège et exprimait son envie d’aller au terme de son mandat, en mai 2019, auréolé de ses bons résultats à la tête de Radio France. Il était entré dans un bras de fer avec le gouvernement, qui, par la voix de la ministre de la Culture Françoise Nyssen, l’avait appelé à «tirer les conséquences» de sa condamnation. Mathieu Gallet avait déjà été affaibli plusieurs fois au début de son mandat. D’abord par des révélations du Canard enchaîné sur les coûteux frais de rénovation de son bureau, et l’appel, lui aussi onéreux, à un expert en communication. Ensuite par une grève historique qui avait paralysé les antennes de Radio France pendant près d’un mois en 2015, les salariés protestant contre des restrictions budgétaires et des réductions d’effectifs. Né le 8 janvier 1977 à Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne), l’homme, ambitieux, est diplômé en 1999 de l’Institut d’études politiques (IEP) de Bordeaux et titulaire d’un DEA d’analyse économique des décisions publiques. Il commence la même année sa carrière dans le privé chez Erato Disques, label de Warner, puis devient en 2000 responsable de l’administration des ventes internationales de Pathé. En 2001, il rejoint le groupe Canal+, d’abord en tant que contrôleur de gestion de Studiocanal, puis comme chargé de mission pour les relations institutionnelles du groupe (2004-2006). «C’est quelqu’un qui n’est pas resté enfermé dans son bureau. Il a appris en quelques années à connaître beaucoup, beaucoup de monde et s’est lié à des gens importants», commentait en 2015 un présentateur de France Inter, sous couvert d’anonymat, le qualifiant d’«homme de contacts et d’ambitions». Après Canal+ – il n’a pas encore 30 ans -, Mathieu Gallet entre dans des cabinets de droite. D’abord dans l’équipe de François Loos, ministre délégué à l’Industrie dans le gouvernement Villepin, comme conseiller technique chargé de l’audiovisuel et des nouvelles technologies. Il rejoint l’année suivante le ministère de la Culture, comme conseiller technique pour l’audiovisuel sous Christine Albanel, puis comme directeur adjoint de cabinet de Frédéric Mitterrand à partir de 2009. Là, il suit de près des dossiers audiovisuels comme la réforme de la structure de France Télévisions, la suppression de la publicité à la télévision publique ou la numérisation des oeuvres du patrimoine national. Nommé en mai 2010, à 33 ans, PDG de l’INA, Mathieu Gallet avait poursuivi la modernisation de cette institution, en mettant notamment l’accent sur le numérique. En 2014, il est nommé président de Radio France, le plus jeune à ce jour. Il a fait progresser les audiences des radios et redressé les comptes du groupe public, notamment à travers des suppressions de postes, et ce malgré une baisse des ressources publiques. Il a aussi lancé l’offre d’info publique franceinfo avec les autres groupes de l’audiovisuel public.Son nom a surgi de façon inopinée pendant la campagne présidentielle quand Emmanuel Macron a démenti sur le ton de la plaisanterie les rumeurs d’une liaison avec lui.