Télétravail massif: les syndicats de SFR montent au créneau

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Télétravail massif sans «aucune mesure d’accompagnement», «absence» de dialogue social: les syndicats de SFR (groupe Altice) montent au créneau contre leur direction, qu’ils accusent de bafouer les droits des salariés, sous prétexte de crise sanitaire et en dépit des directives gouvernementales. «Tous les salariés sont en télétravail (10.000 en France) sauf ceux dédiés à la supervision ou d’astreinte; beaucoup le subissent et sont en souffrance faute de conditions adéquates que la direction leur refuse», déclare Abdelkader Choukrane, délégué central Unsa (majoritaire) de l’UES SFR (unité économique et sociale). Comme la CFDT (2e) et Sud (non représentatif), il cite le refus de fournir des tickets restaurant qui représentaient une «aide réelle pour les bas salaires» ou du matériel de bureau dont des écrans ou des chaises, et la non-prise en charge partielle des factures d’électricité ou de chauffage. La fédération F3C CFDT a mis en garde vendredi contre une «crue sociale proche». La CFDT SFR assure «n’avoir pas eu d’autre choix» que «d’assigner SFR dès le 11 juin 2020» devant le tribunal judiciaire de Paris, sur ces sujets de titres-restaurant et d’«indemnités d’occupation du domicile à des fins professionnelles». Aucune date d’audience n’est encore fixée, selon le syndicat. Interrogée, la direction n’a pas souhaité commenter cette assignation, alors que la ministre du Travail, Élisabeth Borne, a estimé vendredi sur France Bleu Paris que le télétravail, que le gouvernement appelle à intensifier par mesure sanitaire, «ne doit rien coûter aux salariés». Dans une lettre ouverte aux dirigeants du groupe, datée du 4 février, l’Unsa et la CFDT dénoncent une «absence de dialogue social», un «risque réel d’une atteinte à la paix sociale» et appellent «les actionnaires-dirigeants une dernière fois à remettre la valeur sociale au coeur du débat» afin de «ne pas conduire l’entreprise dans une impasse préjudiciable à tous». «Il n’existe plus d’interlocuteur faisant un lien entre les salariés, leurs représentants et vous. Notre rôle est nié», accusent les deux syndicats, déplorant des «négations multiples des prérogatives dont disposent les différentes instances de représentation du personnel». La direction de SFR «s’étonne de ces critiques», assurant avoir «négocié et conclu un accord collectif avec les organisations syndicales pour accompagner dans les meilleures conditions les situations de télétravail». Elle cite «16 accords collectifs (…) conclus dans un contexte de crise sanitaire inédit» et «plus de 8 négociations en cours sur l’ensemble des sujets ayant trait à la vie des salariés». Mais pour l’Unsa et la CFDT, l’illustration «la plus forte» de la dégradation du climat social est «l’accord intervenu cette semaine sur la vente d’Hivory» – qui détient 10.500 sites de télécommunication en France, avec pour principal client SFR – au groupe espagnol Cellnex, spécialisé dans les infrastructures pour les réseaux télécoms, «sans aucune information préalable». Les syndicats dénoncent aussi le recours au chômage partiel pour 4.500 salariés lors du 1er confinement, pour «un millier à nouveau» cette semaine dans ses boutiques, de même que pour «quelques uns à Mayotte, en attente de confirmation de leur statut». Une «aubaine» pour SFR qui fait «indemniser par la collectivité le financement de la masse salariale», dénonce la CFDT, dans un contexte où au 3T 2020 SFR a vu ses revenus progresser de 4%, à 2,75 milliards d’euros, sur le marché français. La société revendique sur la même période 21.000 clients supplémentaires sur le fixe et 25.000 abonnés supplémentaires sur le mobile. Pour autant, SFR refuse «d’aligner au minimum de la convention collective» les plus bas salaires, «en jouant sur leur part variable annuelle», selon les syndicats. Un rapport du cabinet Sextant, cité par SUD, estime que SFR a réalisé «une économie de 47 millions d’euros» grâce au chômage partiel au printemps 2020.