Ukraine: le dirigeant d’une importante banque publique suspendu suite à l’agression de journalistes lors d’une interview

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Le dirigeant d’une importante banque publique ukrainienne a été suspendu mercredi après une agression contre des journalistes lors d’une interview dans son bureau, un incident qui a provoqué une levée de boucliers en Ukraine. «Lors d’une réunion extraordinaire, le conseil d’administration d’Ukreximbank a décidé de suspendre le PDG», Ievguen Metsger, pour la durée d’une enquête interne, a annoncé la banque dans un communiqué, présentant des excuses pour le «comportement déplorable» du responsable. L’incident s’est produit lundi lors d’une interview du Président Directeur Général accordée à l’émission d’investigations Skhemy («magouilles») de Radio Free Europe/Radio Liberty (RFERL), une organisation financée par les Etats-Unis. Après une question sur un crédit octroyé par Ukreximbank, troisième banque du pays, à des sociétés liées à des séparatistes pro-russes d’Ukraine, le Président Directeur Général a coupé court à l’entretien et ordonné à un collaborateur d’«éteindre» la caméra, puis de «prendre» et d’»effacer» l’enregistrement, selon une vidéo publiée par le programme. Selon RFERL, des employés de la banque ont agressé le caméraman et se sont emparés par la force de sa caméra. La banque a dans un premier temps nié tout recours à la force, accusant les journalistes de provocation, avant de revenir sur ses propos après la publication  mardi soir par RFERL de la vidéo restaurée de l’incident.  Ces images ont provoqué un tollé en Ukraine. La présidence a dénoncé mercredi le comportement «inacceptable» des responsables de la banque dans un communiqué et les ambassades américaine et britannique ont exprimé leur préoccupation. La police a ouvert une enquête pour «entraves aux activités professionnelles des journalistes». 

Dans un communiqué publié sur Facebook, la procureure générale Iryna Venedyktova a promis une enquête «rapide» sur cette «folie».Plusieurs dizaines de journalistes ont manifesté devant le siège de la banque mercredi après-midi brandissant les pancartes sur lesquelles on pouvait notamment lire «Metsger dehors». Le Président Directeur Général, dont une conférence de presse a été annoncée mercredi puis annulée, a présenté ses excuses aux journalistes sur Facebook en expliquant ses «actes impulsifs et irréparables» par un «accès d’émotion» dû au «stress». «Je n’avais pas le droit (…)», a souligné le responsable, assurant avoir «honte». Si les médias jouissent en Ukraine d’une plus grande liberté que dans la plupart des ex-républiques soviétiques, les agressions, y compris physiques, contre des reporters n’y sont pas rares. En 2016, un journaliste chevronné russo-bélarusse, Pavel Cheremet, avait été tué par l’explosion d’une bombe dans sa voiture à Kiev, un meurtre qui n’a toujours pas été élucidé.