Affaire Ina : Mathieu Gallet, sera jugé aujourd’hui

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Mathieu Gallet écopera-t- il comme requis d’un an et demi d’emprisonnement avec sursis
pour «favoritisme» pendant sa présidence de l’Institut national de l’audiovisuel (INA)?
L’actuel patron de Radio France sera fixé lundi lors du jugement rendu par le tribunal
correctionnel de Créteil (Val-de- Marne). Le parquet a réclamé 18 mois de prison avec sursis et 40.000 euros d’amende contre le haut fonctionnaire, président de l’INA entre 2010 et 2014. M. Gallet, 41 ans, est soupçonné d’avoir «favorisé» deux sociétés de conseil,
auxquelles l’établissement public a versé plus de 400.000 euros. En cas de condamnation, le PDG de Radio France n’envisage pas de démissionner: il a assuré qu’il irait jusqu’au terme de son mandat à la maison ronde, prévu en mai 2019. Son procès mi-novembre avait duré une douzaine d’heures. L’audience, rythmée par une demande de nullité de la défense et de longs débats techniques, avait opposé deux univers. A la barre, un jeune patron issu du privé, reconnaissant volontiers son ignorance des procédures de marchés publics – elles lui étaient «totalement inconnues» avant son arrivée à l’INA – et habitué à recourir à des consultants pour diverses missions: conseils en communication, audits stratégiques ou conception de projets. En face, la procureure Amélie Cladière, soupçonnant un usage frauduleux de l’argent public à des fins personnelles.Pourquoi M. Gallet a-t- il engagé Denis Pingaud, un professionnel de l’audiovisuel payé comme «conseiller externe» par l’INA? Rémunéré 5.000 euros par mois, il a perçu 130.000 euros hors taxes, facturés par une société qu’il dirigeait: Balises. Un montant total qui aurait dû forcer l’établissement à le mettre en concurrence, pour respecter la réglementation des marchés publics.

«Coach personnel» : Pour Mme Cladière, M. Gallet s’est payé un «coach personnel (…)
avec de l’argent public», notamment pour lancer sa candidature à la direction de Radio
France. Un scénario «au minimum insultant, au pire diffamatoire», selon M. Gallet. Lui
rejette la faute sur «les équipes en place» à l’INA, qui ne lui ont pas transmis de «signaux
d’alerte» sur la nécessité d’un appel d’offres. Au contraire de celles de Radio France:
lorsqu’il en est devenu président, M. Pingaud y a obtenu un contrat de 12 mois, ensuite
mis en concurrence. Ses avocats dénoncent une «enquête à charge» du parquet, qui
reprend les thèses des «soldats d’Agnès Saal», la successeure de M. Gallet à la tête de
l’INA. Poussée vers la sortie à cause de ses frais de taxis exorbitants, Mme Saal avait
provoqué en 2015 un scandale qui avait engendré un signalement du ministère de la
Culture sur la gestion passée de l’INA, et fourni la base pour les accusations de
«favoritisme» contre M. Gallet. Second volet de l’affaire, un contrat de 2013 entre l’INA et
la société de conseil Roland Berger Strategy, pour 289.000 euros hors taxes. La
procureure avait fustigé un appel d’offres «trop court» de cinq jours, faussé par M. Gallet
qui avait informé Roland Berger dès 2010 que l’INA aurait besoin de fusionner deux de ses
directions. «Enorme confusion», avait rétorqué la défense, en défendant la régularité de
cette procédure: les sociétés avaient cinq jours pour envoyer leur «fiche d’identité», mais
disposaient de plusieurs semaines pour formuler une véritable offre commerciale.