Dans un paysage média concurrentiel, cap sur le direct et les jeunes adultes

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Des plateformes «sous pression», plus de sport et de direct, résistance de la télé traditionnelle… Tour d’horizon des tendances mondiales dévoilées lundi par Médiamétrie à Cannes au Miptv, rendez-vous international de l’industrie audiovisuelle.

– La télé traditionnelle résiste : En 2023, les téléspectateurs de 86 pays ont passé en moyenne 2h21 par jour devant les chaînes traditionnelles, soit 4’ de moins qu’en 2022. Chez les jeunes (15-34 ans), le temps passé devant le poste a diminué de 3’, à 1h27. Mais la télé à l’ancienne résiste à la concurrence des plateformes de streaming, elles-mêmes sous pression. Aux Etats-Unis, par exemple, les grands «networks» (chaînes traditionnelles) restent des «points de repère», explique Frédéric Vaulpré, directeur de Glance, le département international de Médiamétrie, groupe spécialisé dans la mesure d’audience et dont l’étude s’appuie sur des données de ses équivalents étrangers. De juin 2021 à février 2024, la part du streaming dans la consommation de programmes est certes passée outre-Atlantique de 31% à 43% mais cela s’est fait au détriment des chaînes payantes du câble (dont la part est tombée de 44% à 31%), les «networks» ayant gagné un point, à 26%. En outre, l’augmentation de la part du streaming, dominé par Netflix, a été portée essentiellement par YouTube (10,5% du temps de visionnage, «4 points) et des acteurs gratuits comme Tubi, la part captée par Disney», Hulu et Prime Video n’ayant pas ou peu progressé. Dans le même temps, les diffuseurs traditionnels, à l’instar de TF1 ou France Télé dans l’Hexagone, ont renforcé leurs plateformes pour qu’elles ne soient plus un simple service de replay.

– La fin du binge-watching ? : Contraintes de freiner leurs dépenses, les plateformes ont lancé «beaucoup moins» de nouveautés en 2023. Glance en recense un peu plus de 1.900 dans 48 pays, contre plus de 2.300 en 2022, soit une baisse de 18%. La télé traditionnelle a, elle, lancé 5.200 programmes en 2023, en baisse de 2%. Les plateformes recourent, par ailleurs, de plus en plus à l’échelonnement des productions pour les faire vivre plus longtemps, plutôt qu’au lancement en une fois d’une saison entière, qu’elles avait popularisé. La dernière saison de la série «The Crown» a ainsi été coupée en deux parties, espacées d’un mois fin 2023. En France, la série «D’argent et de sang» a été diffusée à l’ancienne sur MyCanal, à raison d’un épisode par semaine, et est arrivée en tête des programmes les plus vus sur une plateforme payante en février, souligne Frédéric Vaulpré. «C’est la fin du binge-watching (visionnage à la suite de tous les épisodes disponibles d’une série, NDLR), trop coûteux» car il «brûle» un programme trop rapidement.

– Le pouvoir du direct : Concernant les chaînes traditionnelles, leurs programmes restent très majoritairement consommés en direct partout dans le monde. Au Royaume-Uni, le programme le plus regardé l’année dernière, la série «Happy Valley», (10,6 millions de spectateurs), l’a été à 71% en direct sur BBC One. En France, le quart de finale du Mondial de rugby entre la France et l’Afrique du Sud (16,5 millions) a été suivi à 100% en direct. De quoi justifier l’incursion des plateformes dans le sport, récemment illustrée par l’accord de diffusion entre Netflix et la Ligue professionnelle américaine de catch WWE.

– Ce que veulent les jeunes : A la télé traditionnelle, les programmes qui ont le mieux marché auprès des jeunes sont les émissions de télé-réalité ou événementielles, comme «Koh-Lanta» et «Miss France» dans l’Hexagone, «L’île de la tentation» et l’«Eurovision» en Espagne. Côté plateformes, au Royaume-Uni, le top 20 des programmes les plus regardés par les jeunes adultes, tous sur Disney+ et Netflix, ne comporte que trois productions originales.

Toutes les autres sont nées sur des chaînes traditionnelles, à l’instar de la série pour enfants «Bluey», des «Simpson», «Friends» et «The big bang theory», qui constituent le Top 4.