Intermittents du spectacle: Manuel Valls tente de trouver une issue

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Après six mois de concertation, le Premier ministre Manuel Valls va tenter mercredi de trouver une issue au dossier explosif des intermittents du spectacle, avec l’annonce de «propositions» pour sortir de la crise récurrente autour de leur régime d’indemnisation spécifique. Le Premier ministre, dont l’épouse Anne Gravoin est violoniste, avait pris la main en juin sur le dossier, évitant in extremis une annulation en chaîne des festivals d’été menacés par la mobilisation des intermittents pour la défense de leur régime. La «concertation» lancée en juin pour désamorcer la crise et pilotée par le député socialiste Jean-Patrick Gille, l’ancienne directrice du Festival d’Avignon Hortense Archambault et Jean-Denis Combrexelle, ex-directeur général du Travail, a remis mercredi matin ses conclusions. Le Premier ministre prononcera dans la foulée un discours à 11h00 en présence des ministres Fleur Pellerin (Culture) et François Rebsamen (Travail). Le trio chargé de la concertation a voulu éviter les pièges d’un «énième rapport bourré de préconisations que personne n’applique», explique Jean-Patrick Gille. «Nous proposons des outils et une méthode». Le rapport préconise de garantir par la loi le régime spécifique des salariés du spectacle, contenu dans les fameuses «annexes 8 et 10» de la convention d’assurance chômage. Il écarte l’option d’un transfert à l’Etat de l’indemnisation des salariés du spectacle, lancée comme un pavé dans la mare par le Medef au début de la négociation de la convention chômage adoptée en mars 2014. Pour la méthode, le rapport suggère d’élargir la négociation des annexes 8 et 10 à l’ensemble de la profession, intermittents et entreprises du spectacle, mais seulement après la fixation par l’Unedic du cadre financier, c’est-à-dire l’enveloppe d’économies à réaliser. «On serait presque complètement satisfaits s’il n’y avait pas cette recommandation», a réagi Denis Gravouil, secrétaire général de la CGT Spectacle. La principale revendication des intermittents, le retour à une date anniversaire au lieu du système glissant instauré en 2003 pour le calcul des droits, est «envisageable», notent les 3 sages, «même si aucun système alternatif ne fait aujourd’hui consensus». Le trio recommande aussi de «réguler le recours aux CDD d’usage», abusivement utilisés, notamment par les sociétés de production audiovisuelles, alors que certains postes pourraient être permanents. Un «fonds pour l’emploi» pourrait être créé pour faciliter le passage des CDD d’usage en Contrats à Durée Indéterminée (CDI). Le Premier ministre devrait proposer dans la foulée de ce rapport de lancer des discussions en vue de la prochaine négociation de la convention chômage, prévue fin 2015 ou début 2016. En attendant, l’Etat continuerait à assumer la compensation de la mesure la plus décriée de la précédente convention, le «différé d’indemnisation» (coût estimé à 90 millions d’euros en année pleine). Ce dispositif, neutralisé provisoirement par le gouvernement, élargissait le délai de carence pour le versement des indemnisations des intermittents. L’enjeu pour le gouvernement sera de convaincre les intermittents que ce «plan de travail» va aboutir à une vraie réforme du système et ne vise pas seulement à ménager les partenaires sociaux. En effet, autant le Medef que la CFDT et FO, signataires de la convention contestée, ont fait part de leur réticence à rouvrir la négociation avant l’échéance normale. «C’est encore une manoeuvre dilatoire», avait réagi mardi Samuel Churin, un des porte-parole de la coordination des intermittents. Il craint que la prochaine négociation en 2016 soit marquée «par une nouvelle diminution des droits des chômeurs».