Justice/ Agression sexuelle: 8 mois avec sursis requis contre une productrice de films, ex-responsable d’une association féministe

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Huit mois de prison avec sursis ont été requis mardi à l’encontre d’une productrice de films, ex-administratrice du Collectif 50/50, poursuivie pour «agression sexuelle par personne en état d’ivresse manifeste» à l’encontre d’une comédienne. Le procès s’est déroulé dans une salle du tribunal judiciaire de Paris pleine à craquer d’amis de la productrice, ex-administratrice de l’association 50/50 qui prône la parité, la diversité et la lutte contre les violences sexuelles sur les tournages.

La plaignante, représentée par son avocate, Me Anouck Michelin, était absente à l’audience. «Je demande au tribunal de reconnaître (la prévenue) coupable des faits qui lui sont reprochés», a demandé la procureure, requérant huit mois de prison avec sursis probatoire de deux ans, obligation de soins et interdiction d’entrer en contact avec la plaignante. Le tribunal fera connaître sa décision le 23 mai. Les faits remontent au 11 mars 2022 au cours d’une soirée dans l’appartement parisien d’un membre de l’association.

Le lendemain, la comédienne, âgée aujourd’hui de 50 ans – instigatrice notamment du mouvement #MeToo en Afrique – porte plainte contre la productrice, deux ans plus âgée. «J’étais en jupe, elle a mis sa main sur ma cuisse gauche et l’a remontée jusqu’à mon sexe, avec la volonté de me pénétrer, mais mon collant l’en a empêchée, même si j’ai clairement senti son doigt. Je suis restée figée 2 ou  secondes, puis j’ai pris sa main et l’ai repoussée violemment», avait raconté l’actrice aux enquêteurs. La productrice avait été placée en garde à vue pendant près de 48 heures. Comparaissant libre sous contrôle judiciaire, la mise en cause a de nouveau contesté toutes les accusations, «une invention». Elle a raconté qu’elle avait été interpellée «de façon très agressive» par la comédienne qui lui reprochait de fumer à la fenêtre, puis qu’elle lui avait «mis la main dans les cheveux» et lui avait «dit «ça va bien se passer»». «Je ne savais pas que passer la main dans les cheveux était un acte post-colonial», a-t-elle ajouté, plaidant n’avoir «aucune attirance sexuelle pour les femmes». «Ça a gâché ma vie. Je ne lui ai rien fait à part mettre ma main dans ses cheveux», a-t-elle conclu dans un sanglot. Personne n’a été témoin du geste incriminé, ont rappelé ses avocates, Mes Céline Lasek et Fanny Colin, parlant d’une «enquête bâclée, déloyale, déséquilibrée et inéquitable, menée uniquement à charge», en demandant «l’annulation intégrale» de la procédure. Pour Me Michelin au contraire, l’affaire est «simplissime»: «Une soirée mondaine se déroule, l’un des convives désinhibés par l’alcool dépasse les bornes». «On voit tout au travers d’un prisme, ce «On te croit» emporte tout y compris l’esprit critique», a rétorqué Me Lasek. «Vingt-cinq personnes dans une pièce éclairée, sans musique, qui ont assisté à une agression sexuelle et personne n’a rien vu, rien entendu ?». L’affaire avait provoqué l’explosion de l’association féministe qui s’était fait connaître lors de l’édition 2018 du festival de Cannes en rassemblant 82 femmes sur les marches, pour dénoncer «le plafond de verre» dans le monde du cinéma. 82 était alors le nombre de réalisatrices retenues en compétition pour la Palme d’or depuis la 1ère édition en 1946, contre 1.688 hommes.