La Berlinale s’ouvrait lundi en ligne

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Quinze films, mais pas de grandes stars, de tapis rouge ni de salles obscures: la Berlinale, premier festival européen de cinéma de l’année, s’ouvrait lundi en ligne, symbole d’un secteur culturel mis à mal par la pandémie. Deux films français sont en compétition pour tenter de succéder à l’Iranien Mohammad Rasoulof, Ours d’Or 2020. La sélection fait la part belle au cinéma d’auteur et à douze premiers films. Mais elle fait l’impasse sur le cinéma américain ou les grosses productions, pandémie oblige.
Douze réalisateurs et six réalisatrices sont en lice pour le prestigieux prix, qui doit être décerné vendredi à l’issue de ce festival en format réduit à 5 jours au lieu de 10. Le jury, composé cette année de six précédents lauréats de l’Ours d’or, n’a exceptionnellement pas de président. Pour la première fois aussi, il doit attribuer un prix d’interprétation «non-genré», une singularité dans les grands festivals mondiaux, au lieu des traditionnels prix du meilleur acteur et de la meilleure actrice. En raison de la pandémie, cette 71e édition se tiendra en deux temps, les projections ouvertes au public étant repoussées du 9 au 20 juin. Côté compétition, parmi les Français en lice, Céline Sciamma présentera «Petite Maman», l’histoire d’une petite fille dont la mère disparaît et qui trouve une alter ego dans les bois. Réalisatrice du remarqué «Portrait de la jeune fille en feu», elle fut prix du scénario au festival de Cannes en 2019. Cinéaste accompli, auteur de «Des hommes et des Dieux», Xavier Beauvois présentera de son côté «Albatros», un drame social tourné à Etretat. Jérémie Renier y interprète un commandant de brigade dont la vie bascule après avoir tué un homme en voulant l’empêcher de se suicider. Côté allemand figure «Ich bin dein Mensch» de Maria Schrader, récompensée par un Emmy Award l’an passé pour sa série à succès sur Netflix, «Unorthodox». Son nouveau film est une comédie romantique sur un robot interprété par Dan Stevens («Downton Abbey»). L’acteur allemand Daniel Brühl, révélé dans la comédie douce-amère «Good Bye, Lenin» et devenu une star internationale, est lui aussi en compétition avec son premier film en tant que réalisateur, «Nebenan» sur la gentrification à Berlin. Le Roumain Radu Jude, primé en 2015 pour «Aferim» est de retour dans la compétition avec «Bad Luck Banging or Looney Porn» sur une enseignante filmée dans une sextape qui se répand sur le net. En marge de la compétition, le festival berlinois montrera aussi en première mondiale un documentaire de la chaîne HBO sur Tina Turner par les réalisateurs Dan Lindsay et T.J. Martin. Les films ont été réalisés entièrement ou en partie pendant la pandémie, a souligné le directeur artistique du festival Carlo Chatrian. «Si seuls quelques-uns montrent directement le nouveau monde dans lequel nous vivons, ils portent tous sous leur surface l’incertitude des temps que nous vivons», a-t-il déclaré, «un sentiment de crainte est présent partout». Créée en 1951, la Berlinale fut l’an passé le dernier grand festival européen à pouvoir se tenir avant les confinements et les fermetures de salles. Depuis, le calendrier a été bouleversé. Le plus important et le plus prestigieux, Cannes, qui se déroule d’habitude en mai, n’a pas pu se tenir l’an dernier sur la Croisette. L’édition 2021 a déjà été repoussée au mois de juillet. Mais au vu de la situation sanitaire, le festival pourrait bien être obligé d’attendre jusqu’à l’automne, où le calendrier s’annonce déjà serré, avec San Sebastian et la Mostra de Venise. A l’instar de la Berlinale, d’autres festivals ont opté pour le streaming, faute de mieux: le festival de Gérardmer, le plus grand d’Europe dédié au film de genre, a fait le même choix en janvier, ainsi que Sundance, l’un des plus importants festivals de cinéma indépendant aux Etats-Unis.