Relooker sa chambre, customiser ses vieux meubles, refaire sa maison du sol au plafond grâce à la télé: les émissions de décoration connaissent un véritable boom, révélant un engouement des Français pour leur intérieur lié à la démocratisation du marché de la déco. Pas moins de cinq rendez-vous sont proposés à l’heure actuelle aux fans du genre, sur les chaînes hertziennes, de la TNT ou du câble. Le plus célèbre, «D&Co», tous les dimanche sur M6, fait un tabac, surtout chez la ménagère de moins de 50 ans: l’édition du 20 mai a enregistré un record d’audience depuis sa naissance il y a un an, réunissant 3,6 millions de téléspectateurs. «Question Maison» sur France 5, démarrée en 2002, recueille également l’une des plus grosses audiences de la chaîne, tandis que France 2 vient de lancer, fin avril, «Change ta chambre» à destination des adolescents. Ces magazines possèdent chacun leur style pour des publics variés, proposant des reportages sur l’artisanat, les tendances ou la maison de demain. Mais ils ont un point commun, le «avant-après»: l’équipe de l’émission débarque chez un particulier pour redécorer ou réaménager les pièces, avec un budget varié (1 000 euros pour «Téva Déco», 2 000 à 2 500 euros pour D&Co, 5 000 à 10 000 euros pour «Question Maison»…). Ludique, ce concept accroche le téléspectateur car il raconte une histoire tout en prodiguant des conseils pratiques. Que l’action se déroule dans une maison Phénix ou dans une superbe villa du Bordelais, chacun peut y trouver son compte. Ces émissions croulent sous les demandes de candidats. «Parfois on devient dingues, il y a des jours où on reçoit 300 lettres!», confie Valérie Damidot, présentatrice de «D&Co». Stéphane Thébaut, animateur de «Question Maison», reçoit «3 000 demandes par semaine». «On assiste à un vrai boom de la déco depuis deux ou trois ans», sur lequel la télévision crée un «effet loupe», analyse Cendrine Dominguez, animatrice et productrice de «Téva Déco», pionnière du genre qui vient de souffler ses 10 bougies. Les Français connaissent mieux le marché de la décoration qui s’est fortement démocratisé avec la multiplication des enseignes. «Il y a dix ans il n’y avait qu’Ikea. Depuis, on assiste à une poussée des marques qui se sont mises à la déco: Conforama, Leroy Merlin, Fly… Même Monsieur Meuble a embauché des jeunes designers», souligne Valérie Damidot. De fait, la déco devient plus accessible. Et le mobilier traditionnel est désacralisé. «C’est la fin du syndrome de Versailles», résume Cendrine Dominguez: on est moins intimidé qu’autrefois par l’héritage typiquement français du vieux meuble de grand-mère qu’on ne va pas hésiter à «customiser» (personnaliser, NDLR) ou à revendre». «Fini la commode en merisier qu’on se coltine pendant 40 ans dans le salon. Aujourd’hui on change la déco au gré de nos envies, mixant Ikea avec un meuble d’une brocante ou des familles», renchérit Stéphane Thébaut. «On commence à faire ce que les pays nordiques ont initié il y a dix ans», observe-t-il. La baisse du pouvoir d’achat explique également ce recentrage sur son intérieur «puisqu’on préfère recevoir chez soi qu’aller au restaurant», selon lui. Mais ce désir de «cocooning» est aussi un signe de bien-être, estime Valérie Damidot. «Si les gens s’intéressent à leur maison, c’est qu’ils ont envie d’aller mieux».