Les menaces sur le financement du cinéma argentin, a suscité une levée de boucliers de réalisateurs de renom à l’international

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Une velléité du gouvernement ultralibéral de Javier Milei de réduire le budget de la culture, du cinéma notamment, a suscité une levée de boucliers de réalisateurs de renom, en Argentine et à l’international, amenant l’exécutif à un début de marche arrière.

Une des dispositions du vaste train de réformes, dit «loi-omnibus», à l’examen au Parlement, visait une refonte du financement de l’Institut National du Cinéma et des Arts audiovisuels (INCAA), passant d’un système de subventions à un système de prélèvement (10%) sur le prix des places de cinéma. Une réforme équivalant à une réduction drastique des fonds dévolus au cinéma, et qui engendré les fortes protestations d’acteurs et cinéastes argentins tels Santiago Mitre, réalisateur de «Argentina, 1985», vainqueur d’un Golden Globe et nominé aux Oscars 2022. «L’Argentine est le pays qui a le plus de nominations aux Oscars dans la région (Amérique latine), car il existe une loi sur le cinéma qui soutient et encourage l’existence du cinéma argentin», a plaidé M. Mitre entendu en commission parlementaire. «Le cinéma ne demande pas d’argent, il demande à pouvoir s’autofinancer». Dans la foulée, une tribune de plusieurs dizaines d’acteurs et réalisateurs étrangers, parmi lesquels Pedro Almodovar, Aki Kaurismäki, les frères Dardenne, Alejandro Gonzalez Iñarritu, Isabelle Huppert, a pris la défense du cinéma argentin, «industrie vivante, hétérogène et dynamique», soutenu par l’Etat depuis 90 ans. Le cinéma argentin «génère des milliers d’emplois, exporte du contenu et attire les investissements étrangers», et la loi envisagée «aura un effet dévastateur, incalculable et irréparable sur toute la culture et la souveraineté nationale (…) résultant en milliers de nouveaux chômeurs», poursuit le texte.

L’exécutif, engagé dans d’intenses tractations au Parlement pour faire adopter sa loi-omnibus malgré une position minoritaire – le parti de Milei n’est que la 3e force – a présenté lundi soir une version remaniée du texte, qui vise a «protéger les ressources du secteur, mais en préservant l’objectif que les dépenses administratives ne constituent pas une charge excessive». Le nouveau texte, qui doit encore être débattu préserve le financement de l’INCAA, mais pose des limites strictes à ses dépenses et frais de fonctionnement, comme à l’Institut national de la Musique, ou à la Commission des bibliothèques. Il pose aussi des restrictions au financement des productions ou coproductions. Milei lui-même s’était immiscé dans le débat, agacé par les protestations du monde argentin du cinéma, en affirmant : «Il n’y a pas d’argent. Or, je dois choisir si on utilisé les ressources de l’Etat pour financer des films que personne ne regarde, maintenir le niveau de vie d’acteurs avec certaines affinités politiques, ou pour nourrir les gens».