Nouvelle-Calédonie: la création de chaînes tv alimente la controverse

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L’aval fin janvier du CSA à la création de deux chaînes de télévision privées alimente la controverse en Nouvelle-Calédonie et l’une d’elles, NC9, défendue par l’UMP locale, pourrait bien avoir déjà le bec dans l’eau. Depuis la décision du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), la polémique ne cesse d’enfler sur ces chaînes locales de la TNT, qui ont un délai de six mois pour émettre, au risque de perdre leur autorisation. Le projet baptisé NC9, soutenu par la branche locale de l’UMP (R-UMP) et plus discrètement par le parti indépendantiste Union Calédonienne, suscite le plus de remous. Ses détracteurs accusent le CSA de l’avoir autorisé en dépit de nombreuses failles. Reçu jeudi dernier par Olivier Schrameck, nouveau président du CSA, le député Philippe Gomes (UDI) a déclaré qu’il ferait tout «pour combattre ce projet de télévision de propagande». Il a mis en cause la partialité d’un ex-membre du CSA, Alain Méar, qui aurait selon lui, poussé le dossier NC9, juste avant son départ, «comme un dernier cadeau». «C’est une décision inique. Moi ce que je crois c’est qu’il y a quelqu’un au CSA qui était à la solde du R-UMP et qui a trompé les autres membres du CSA qui, de bonne foi, ont accordé l’autorisation de NC9», a affirmé l’élu. Présentée comme une télé «partagée», NC9 aura deux rédactions et deux JT, censés illustrer les deux légitimités du Caillou: non indépendantiste de droite et kanak indépendantiste. En dépit des dénégations de ses responsables, cette télévision apparaît aussi être le bras médiatique de l’entente politique passée en 2011 entre le R-UMP et l’UC (Union calédonienne, indépendantiste). Cette alliance a cependant été sévèrement sanctionnée par les électeurs lors des législatives de juin dernier, semant la discorde dans les rangs du R-UMP, au bord de la scission. Depuis, le financement de NC9 (7 millions d’euros par an) apparaît menacé. Potentiels bailleurs de fonds, le gouvernement local, l’Office des Postes et télécommunications et la mairie de Nouméa ont récemment fait savoir qu’il n’était pas question de mettre la main à la poche. Un enregistrement pirate, posté le 18 février sur internet, de Cynthia Ligeard, présidente R-UMP de la Province sud, a ravivé la polémique.
A l’occasion d’une réunion de parti, elle avait affirmé que cette télé avait pour but «de porter notre message politique». Elle disait aussi qu’afin d’obtenir l’autorisation du CSA, elle avait signé une lettre d’intention pour un financement provincial de 250 millions CFP (2 millions euros). «Hélas, le projet semble de plus en plus compromis», ajoutait Mme Ligeard. Financé à 85% par la province nord indépendantiste, NCTV, l’autre télé en gestation, connaît moins d’embuches, et émet déjà sur internet depuis plusieurs mois. «On est une chaîne généraliste et de proximité, moins politique avec un JT de seulement 6 minutes par jour. Développer la cohésion du pays et mettre en avant ses habitants est notre ambition», explique Yacine Sabeg, conseiller au sein de l’équipe de NCTV.
Alors que la vie chère, la réduction des inégalités ou encore le logement social sont des dossiers brûlants en Nouvelle-Calédonie, la création de deux télés, qui pourraient coûter en tout 2 milliards CFP (16,5 millions euros), suscite toutefois la défiance de la population. Une pétition demandant à ce que «l’argent des contribuables calédoniens serve à autre chose qu’à alimenter les rêves de politiciens mégalomanes», a recueilli près de 5.000 signatures.