Radio France: grève massivement suivie mardi

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En colère et déterminés, les salariés de Radio France étaient massivement en grève mardi pour contester un nouveau plan d’économies prévoyant environ 300 suppressions de postes, qui vise selon des syndicats à «détruire la radio publique». La grève lancée par l’intersyndicale de Radio France était massivement suivie mardi par «trois quarts des salariés» au tableau de service selon l’intersyndicale, et 32,77% du total des salariés selon la direction, soit près de 900 grévistes. De France Inter à France Bleu, les antennes du groupe public se sont retrouvées fortement perturbées dès le petit matin, proposant souvent de la musique à la place des émissions et chroniques. Les autres activités du groupe étaient également affectées, avec «85% de choristes en grèves» et des services administratifs «fortement mobilisés», selon le SNJ. La chaîne franceinfo était aussi perturbée, et le concert de l’orchestre philharmonique prévue dans la soirée a été annulé. A travers cet «appel du 18 juin», l’idée était selon les syndicats d’envoyer un «coup de semonce» quelques jours après l’annonce de ces suppressions de postes, et à la veille d’un conseil central d’entreprise. Alors que les radios publiques affichent d’excellentes audiences et que le groupe a retrouvé l’équilibre financier, plusieurs centaines de salariés ont exprimé leur incompréhension et leur colère dans l’ambiance surchauffée d’une AG mardi midi à la Maison de la radio. «Est-ce que la mission de Sibyle Veil est de protéger Radio France, ou est-elle en charge d’une mission libérale pour détruire la radio publique et donner de l’air aux radios privées?», a lancé Manuel Houssay, représentant de la CGT. Les salariés protestent contre le plan de 60 millions d’euros d’économies (d’ici à 2022) annoncé début juin par la présidente du groupe Sibyle Veil. Le plan vise à anticiper la baisse de la contribution de l’Etat (moins 20 millions d’euros sur 4 ans) et la hausse des charges de personnel, et prévoit d’investir davantage dans le numérique. Ce plan «Radio France 2022» prévoit une réorganisation des rythmes de travail, pour éviter le recours aux CDD, et des suppressions de postes, suivant notamment la recommandation de la Cour des comptes, qui décrivait en janvier la renégociation du temps de travail comme un «chantier prioritaire». La direction propose de supprimer 270 postes dans tous les métiers si les salariés acceptent de faire une croix sur des semaines de congés, ou 390 postes s’il n’y a pas d’accord avec les syndicats. «On nous fait passer pour des branleurs!», a souligné Valeria Emanuele du SNJ. «Qui connaît les sacrifices qu’on fait ?». Les syndicats demandent «le retrait de ce plan dangereux et destructeur» ainsi qu’un «effectif et des moyens nécessaires pour remplir nos missions de service public», et se méfient de l’attitude de Sibyle Veil, qui avait déjà mené un large programme de restructurations à l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, il y a quelques années. Mardi après-midi, la direction de Radio France a «pris acte» «de la mobilisation de ce jour, et «propose aux partenaires sociaux de poursuivre le dialogue pour construire avec eux un équilibre entre les efforts indispensables et les perspectives apportées à l’entreprise et à ses salariés». Confronté comme France Télévisions (qui réduit aussi ses effectifs) à une baisse de ses crédits, le groupe veut boucler cette réforme à l’automne avant de négocier son Contrat d’objectifs avec l’Etat. Syndicats et direction s’affrontent désormais autour du rapport d’un cabinet indépendant qui, mandaté par le comité social de Radio France, a qualifié les économies visées de «surdimensionnées», et estimé que Radio France pourrait s’épargner 118 suppressions de postes. La direction de Radio France a contesté ce rapport, évoquant une «méthodologie erronée».Marie Message, qui a remplacé Sibyle Veil comme directrice des Opérations et des finances de Radio France, a assuré que des explications et des chiffres supplémentaires seraient donnés mercredi par la direction en conseil central.