«Tracking» et déconfinement : sous la pression des oppositions, les députés ont décidé de voter

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Sous la pression des oppositions, le gouvernement a finalement décidé mardi que les débats à l’Assemblée nationale sur le «tracking» et le déconfinement progressif seraient suivis de votes, dans un hémicycle qui va se regarnir. Des élus de droite comme de gauche étaient montés au créneau ces derniers jours pour réclamer un scrutin sur le sujet sensible du traçage des données mobiles dans la lutte contre le coronavirus, à l’issue du débat prévu le 28 avril. Le Premier ministre Edouard Philippe n’y avait pas fermé la porte lundi et l’annonce du vote a finalement été faite mardi. Alors que le projet est également critiqué par certains dans la majorité pour ses risques concernant la vie privée des utilisateurs, le président des députés LREM Gilles Le Gendre avait fait grincer des dents en estimant lundi que le débat était «essentiel» mais que «le vote n’apporterait rien de plus», en raison des règles sanitaires et des effectifs «très réduits» à l’Assemblée. Selon un responsable d’opposition, ses déclarations ainsi que celles du secrétaire d’Etat au Numérique Cédric O, ont «mis le feu aux poudres» et rendu le vote inéluctable. Cédric O avait notamment fait valoir que l’application de traçage ne serait «pas prête pour le 28 et 29 avril», date du débat prévu devant le Sénat, jugeant que la «discussion peut difficilement donner lieu à un vote qui donnerait un oui ou un non sur un élément non finalisé». L’application «StopCovid», envisagée par l’exécutif, doit permettre à l’utilisateur d’être prévenu s’il a croisé une personne contaminée par le virus. Elle fonctionnerait sur la base du volontariat. Le président Emmanuel Macron avait annoncé le 13 avril son souhait de voir le Parlement se saisir de cette question polémique, en vue du déconfinement à partir du 11 mai. Selon un membre du groupe majoritaire, «le vote va être très, très compliqué» au sein des «marcheurs». Parmi les élus LREM hostiles au dispostif, Sacha Houlié, qui avait dénoncé une réponse «dangereuse» avec le traçage, a jugé «normal» sur Twitter que le Parlement puisse se prononcer. Pour Damien Abad (LR), il y a bel et bien «un risque de fracturation» de la majorité. Les élus souhaitant voter contre pourront se signaler en amont. Et si le scrutin n’aura pas de force contraignante, il aura «une valeur politique forte», a-t-il prédit devant la presse: en cas de vote majoritairement défavorable, «je ne vois pas comment (le gouvernement) pourrait passer outre». «Plutôt réservé», le groupe de droite devrait opter pour la liberté de vote sur ce dispositif qui «ne peut être l’alpha et l’oméga du déconfinement», selon M. Abad. Même satisfecit quant au scrutin de la part des députés communistes qui soulignent que l’Assemblée n’est pas une «chambre d’enregistrement». Ils se prononceront contre le traçage «sans ambiguité», y voyant le «symbole d’une start-up Nation» dont l’efficacité n’est «pas démontrée», selon leur porte-parole Sébastien Jumel. Le secrétaire national d’EELV Julien Bayou a de son côté jugé «incroyable qu’il faille se démener autant pour obtenir de ce gouvernement de… faire voter le Parlement». Au Sénat, les modalités du débat n’ont pas encore été fixées. Les socialistes notamment souhaitent regrouper les échanges sur traçage et déconfinement, avec un vote in fine. Concernant la sortie progressive du confinement à partir du 11 mai, le chef de l’Etat poursuit ses consultations pour préparer l’après en recevant notamment Richard Ferrand (LREM) et son homologue du Sénat Gérard Larcher (LR) à déjeuner mardi. Un vote aura bien lieu à l’Assemblée, à une date restant à déterminer, ce que LR réclamait notamment. Les élus veulent surtout être associés à l’élaboration du plan de déconfinement. Pour les députés PCF, le scrutin est «la moindre des choses», mais il faut une «co-élaboration démocratique». Ils réclament «un plan de déconfinement de la démocratie».