Trente ans après Dechavanne, Patrice Carmouze monte sur scène 

On se souvient de ses démonstrations lunaires, toujours ratées, dans l’émission télévisée «Coucou c’est nous !» Trente ans après, Patrice Carmouze propose sur scène une mise en lumière pleine d’humour de «l’à-peu-près» à l’ère des réseaux sociaux, «où moins on maîtrise les sujets, plus on donne son avis». «Aujourd’hui, l’opinion prime sur tout, sans connaître forcément les dossiers. (…) On est dans une société de l’à-peu-près», estime dans un entretien Patrice Carmouze, à l’affiche avec «Eloge de l’a peu près» au Théâtre de Poche-Montparnasse à Paris jusqu’au 19 mai. «Depuis quelques années, le niveau moyen intellectuel a monté. Près de 90% des gens ont le bac et sont à même de comprendre et de juger, mais avec la certitude de pouvoir parler de tout», développe l’ex-journaliste du Quotidien de Paris. Et «la multiplication des chaînes d’info en continu favorise évidemment ce phénomène». C’est «intéressant démocratiquement mais, en même temps, il y a une limite avec des sujets qu’il vaut mieux un peu connaître avant d’en parler.» Dans un cours magistral qui n’a rien d’ennuyeux, avec les zygomatiques à l’épreuve, Patrice Carmouze convoque donc de façon accessible plusieurs philosophes dont Nietzsche, Wittgenstein ou le Français Jacques Bouveresse. Ce dernier, décédé en 2021, a été l’un des premiers à se désoler, il y a quelques années, que «l’à-peu-près et l’imposture progressent de façon incroyable». Passant du coq à l’âne pour mieux bétonner son sujet, l’ex-journaliste et animateur de 73 ans prend à témoin ses spectateurs à l’occasion de devinettes au tableau noir, quand il ne s’installe pas au piano, dévoilant un talent caché en interprétant lui-même des chansons de Brel, Brassens, Trénet et même Hallyday. 

Acolyte faussement ahuri : «J’ai un peu peur que l’ultracrépidarianisme (donner son avis sans compétence, NDLR) domine malheureusement pendant quelques années», dit celui qui fustige au passage «la remise en cause très forte dans la société de tout savoir jusqu’au complotisme, y compris chez les jeunes». Rédacteur en chef au Quotidien de Paris dans les années 80, Patrice Carmouze a participé à l’émission «Rive droite / Rive gauche» sur Paris Première, avec un temps sur Europe 1, après les années Dechavanne dont il était l’acolyte faussement ahuri dans «Coucou, c’est nous !». Sur la chaîne régionale TV78, il raconte des faits divers et de grands événements historiques. Depuis de nombreuses années, il signe aussi trois fois par semaine des éditos pour le groupe Sud-Ouest, notamment dans «L’Éclair des Pyrénées». En 2021, il a fait ses premiers pas au théâtre avec «Attention, Desproges !», compilation des textes les plus impertinents de l’humoriste. A propos de «Coucou, c’est nous !», Patrice Carmouze garde le souvenir d’une «période complètement folle, avec une grande liberté, même si on pouvait se faire engueuler après une émission mais sans jamais nous demander avant le conducteur». Resté proche de Christophe Dechavanne, qui vient de faire appel d’une condamnation pour conduite sous l’emprise de stupéfiants, il se dit «catastrophé par ce qui lui est arrivé». «Dans la société d’aujourd’hui, justement avec les réseaux sociaux, on est obligé de prendre les devants», estime-t-il. «Malgré la présomption d’innocence relancée par l’appel, la décision de Christophe de se retirer de «Quelle Époque !» a été assez digne car il ne voulait pas mettre en péril l’émission qui lui a permis de revenir à la télé.»