Une ancienne élue Modem du Conseil régional du Grand Est est visée par une enquête pour des soupçons d’atteintes à la probité, en raison de possibles liens financiers avec le géant des télécoms chinois Huawei, a-t-on appris jeudi de source proche du dossier. Selon cette source, confirmant une information du magazine «Challenges», il s’agit de Lilla Merabet, ancienne vice-présidente de la région Grand Est (2015-21), chargée de l’innovation et du numérique.
Une source judiciaire a confirmé qu’une enquête avait été ouverte par le Parquet national financier (PNF) en octobre 2023 pour «des faits d’atteintes à la probité», qui est toujours en cours. Ces atteintes regroupent les infractions telles que corruption, trafic d’influence ou prise illégale d’intérêts. Les bureaux de Huawei, dont le siège français est situé à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), ont été perquisitionnés en février.
«Huawei a pleinement coopéré avec les enquêteurs et continuera de le faire. Huawei est présent en France depuis plus de 20 ans et a toujours respecté l’ensemble des lois et réglementations françaises», avait déclaré le groupe dans un communiqué. Arrivé en 2003 en France, Huawei fait actuellement construire une usine en Alsace, sa première hors de Chine, avec l’objectif d’y débuter début 2026 une production d’équipements pour réseaux télécoms mobiles, notamment 5G. Selon Challenges, l’enquête a démarré à la suite d’un signalement, au printemps 2023, de Tracfin, la cellule de renseignement de Bercy, qui aurait découvert des flux financiers de Huawei vers la société de conseil Oxymore Resolution, créée par Lilla Merabet alors qu’elle siégeait au conseil régional.
Fin 2020, Mme Merabet avait été condamnée à 4.500 euros d’amende par la cour d’appel de Colmar pour «non déclaration» de ses intérêts à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, qui mentionnait sa participation à hauteur de 90% au capital d’Oxymore Resolution.
Dans une lettre de février 2021, Jean Rottner, alors président (LR) de Région, avait affirmé que Huawei n’avait bénéficié «d’aucun traitement de faveur» pour s’installer en Alsace. Une subvention annoncée de 800.000 euros n’a jamais été versée, Huawei n’ayant pas tenu le calendrier prévu, indique-t-on au conseil régional. Le groupe est au centre d’une intense rivalité technologique entre la Chine et les Etats-Unis, qui accusent l’entreprise, sans avancer de preuves, de pouvoir espionner au profit de Pékin. Huawei dément ces allégations. L’an dernier, la Commission européenne a appelé les 27 pays membres et les opérateurs télécoms à l’exclure de leurs réseaux mobiles.