A Bouc-Bel-Air, la mairie prend le contre-pied de la série coréenne ultra-violente «Squid Game»

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Pour prendre le contre-pied de la série coréenne ultra-violente «Squid Game», qui commençait à envahir les cours de récréation de ses écoles primaires, la mairie de Bouc-Bel-Air a organisé une semaine de «Cop’s Game». «On s’est aperçu que les enfants voyaient cette série sud-coréenne et qu’en fait ils étaient marqués par ça», explique mardi Richard Mallié, le maire de la commune de 15.000 habitants. «Donc la proposition a été de monter un jeu, qui s’appelle «Cop’s Game», le jeu des copains, qui est totalement l’inverse» de ce qui se passe dans la série diffusée sur Netflix, complète-t-il. Dans le 1er épisode de «Squid Game», plusieurs centaines de participants ayant pour seul point commun un impérieux besoin d’argent, se retrouvent convoqués à une mystérieuse compétition pour laquelle ils ont été sélectionnés au terme d’une humiliante séance de gifles. Le 1er jeu qu’on leur propose est un «1,2,3 soleil» qui n’a d’enfantin que son titre. Car dans cette version, c’est une poupée géante équipée de caméras de détection des mouvements qui identifie les joueurs ayant bougé. En guise de retour au poulailler, ils sont exécutés sur place. Rien de tel, certes, dans les cours de récréation de Bouc-Bel-Air, mais des comportements qui commençaient cependant à être suffisamment préoccupants pour que la mairie décide de prendre les devants. «Un petit peu partout dans nos cours d’école» des enfants jouaient à 1,2,3 soleil «et les perdants, ceux qui bougeaient, recevaient une paire de gifles. C’est ce qui nous a alertés avant les vacances scolaires», raconte Audrey Terzian, directrice adjointe du service scolaire de Bouc-Bel-Air. «A Halloween, les enfants sont arrivés déguisés en «Squid Game»», complète-t-elle, estimant qu’environ 60% des quelque 350 élèves de CM1 et CM2 des 4 écoles de Bouc-Bel-Air ayant participé à «Cop’s Game» ont vu la série coréenne, pourtant interdite aux moins de 16 ans. Alors que dans «cette série, avec 1,2,3 soleil, on a l’individualisme qui ressort à outrance, avec «Cop’s Game», pour gagner, il faut arriver tous ensemble», détaille le maire. Mardi, dans la cour de l’école de La Salle, les 40 enfants alignés attendent que Julianna, animatrice périscolaire, se retourne et commence à compter. Mais pas question de se précipiter pour atteindre la ligne d’arrivée le premier. Ici, les enfants, bras dessus bras dessous, forment une seule chaîne humaine. Impossible dans ces conditions d’avancer sans les autres, sans se coordonner, au risque de faire bouger l’ensemble du bloc et de devoir repartir à la case départ. Difficulté supplémentaire: certains élèves se voient imposer des contraintes (avoir les yeux masqués, avancer à cloche-pied) qui rendent la coopération d’autant plus nécessaire. «Nous sommes sur de la pédagogie innovante et pas sur de la répression, c’est vraiment ce qu’on veut mettre en avant: on peut faire autrement», indique Corinne Le Meut, l’adjointe au maire en charge des affaires scolaires. «Interdire quelque chose à un enfant, c’est lui donner envie de le faire, alors on s’est dit qu’on allait changer le point de vue des enfants et leur montrer la bienveillance, le collectif, la coopération», abonde Mme Terzian. Autant de valeurs qui ont été couronnées, non pas par un conséquent pactole comme dans «Squid Game», mais par la délivrance à chaque élève d’un «diplôme de la bienveillance et de la coopération». «On leur explique qu’ils sont les garants de la bienveillance des jeux de cours», avance Audrey Terzian, pour qui cette expérience n’est qu’un début. ««Cop’s Game», c’est un prétexte qui va nous permettre de traiter plusieurs sujets qui influencent nos enfants», notamment le harcèlement scolaire. «On ne fera pas des miracles mais ce sont de petites graines que l’on sème».