Affaire Pegasus: la Cour suprême indienne ordonne une enquête indépendante sur l’utilisation présumée par le gouvernement du logiciel d’espionnage

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La Cour suprême indienne a ordonné mercredi une enquête indépendante sur l’utilisation présumée par le gouvernement du logiciel d’espionnage Pegasus à l’encontre de journalistes, d’opposants politiques et de militants, le président de la Cour suprême évoquant des implications «orwelliennes». L’Inde fait partie des pays où des dizaines de milliers de numéros ont été ciblés par ce logiciel, commercialisé par la société israélienne NSO, selon une enquête publiée en juillet par un consortium de 17 medias internationaux, dont les quotidiens français «Le Monde», britannique «The Guardian» et américain «The Washington Post», réalisée sous la houlette de la plateforme collaborative Forbidden Stories avec l’appui technique du Security Lab de l’ONG Amnesty international. L’ordonnance fait suite à des pétitions de particuliers qui, selon le président de la Cour suprême N.V. Ramana, «soulèvent des préoccupations orwelliennes». L’État ne peut pas bénéficier d’un «laissez-passer chaque fois que le spectre de la sécurité nationale est soulevé», a déclaré la Cour qui a chargé des experts en cybernétique et en informatique d’examiner les allégations. Il a ajouté que la Cour avait accepté les pétitions car «il n’y a pas eu de démenti spécifique» de la part du gouvernement. Plus de 1.000 des numéros de cibles potentielles établies par le logiciel étaient indiens, parmi lesquels celui du chef de l’opposition, Rahul Gandhi, mais aussi des journalistes, des militants, des critiques du gouvernement et d’anciens juges. Une femme qui avait accusé l’ancien président de la Cour suprême de l’Inde de harcèlement sexuel figurerait également sur la liste. Le logiciel Pegasus permet, une fois installé dans un téléphone mobile, d’espionner l’utilisateur de l’appareil, accédant à ses messageries, ses données, ou activant l’appareil à distance à des fins de captation de son ou d’image. Les critiques disent que son utilisation en Inde s’inscrit dans des attaques croissantes contre la dissidence et les libertés civiles sous le gouvernement nationaliste hindou du Premier ministre Narendra Modi.Selon le Washington Post, une analyse de plus de 20 téléphones indiens figurant sur une liste de cibles potentielles, a montré que 10 d’entre eux avaient été effectivement été visés par Pegasus dont sept avec succès. Peu après la publication de l’enquête sur Pegasus en juillet, le Parlement indien avait été perturbé par des appels de l’opposition demandant une enquête. Le gouvernement indien n’a pas voulu nier ou confirmer l’utilisation de Pegasus pour des raisons de sécurité nationale. Il a proposé de mettre en place sa propre commission.