Comment Meta a perdu pied

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Meta, habitué des profits flamboyants et croissances impudentes, a présenté mercredi dernier des résultats peu flatteurs: le géant des réseaux sociaux perd des utilisateurs sur Facebook, dégage moins de bénéfices de la pub, et dépense à tout-va pour construire un monde de science-fiction. Retour sur les causes de la gueule de bois de Meta.

-TikTok sur ses talons : «Les gens ont beaucoup de choix pour passer le temps. Et des applis comme TikTok grandissent très vite», a déclaré Mark Zuckerberg.Alors que son groupe est accusé d’abus de position dominante, il n’a pas hésité a insister sur les performances de la concurrence, mentionnant aussi Slack ou Telegram pour les messageries. Fin 2021, 3,6 milliards de personnes se connectaient à Facebook, Instagram, Messenger ou WhatsApp au moins une fois par mois. Un chiffre qui stagne. Pour Facebook, c’est pire: la plateforme d’origine a perdu environ 1 million d’utilisateurs quotidiens, une première. Pour ne pas se laisser déborder par le succès phénoménal de TikTok auprès des jeunes, Meta a copié l’appli en 2020 avec les «Reels», des vidéos courtes et incisives. Mais elles ne génèrent pas pour l’instant d’aussi bons taux de rémunération que les formats classiques. «Facebook va revoir ses outils pour mieux attirer les 18-29 ans, mais cela va prendre du temps et leur coûter cher», a souligné Angelo Zino, de CFRA Research. Les analystes espèrent aussi que Meta va tirer des revenus de la messagerie WhatsApp, largement perçue comme une potentielle vache à lait avec ses 2 milliards d’utilisateurs. 

– La pomme acide : Meta avait prévenu le marché: les règles imposées par Apple l’année dernière en matière de ciblage publicitaire allaient peser sur ses comptes. Son voisin californien a imposé aux éditeurs d’applications de demander la permission des utilisateurs avant de collecter des données. Or le modèle économique de Meta repose sur la vente de pubs ultra personnalisées. «Apple a créé deux problèmes», a indiqué mercredi Sheryl Sandberg, la directrice des opérations. «D’abord, la précision de notre ciblage a diminué. (…) Ensuite, la mesure des performances est devenue plus compliquée». En tout, Meta pense gagner 10 milliards de dollars de moins en 2022 à cause de ce changement éthique et technique. Le patron Mark Zuckerberg a aussi mentionné l’impact des régulations européennes sur la pénurie de données exploitables. «Mais les personnes veulent toujours voir des pubs appropriées et les entreprises veulent toucher les clients intéressés. Donc nous reconstruisons notre infrastructure publicitaire pour pouvoir continuer à fournir des annonces personnalisées de haute qualité», a-t-il assuré. 

– Le pari du métavers : Fin octobre, Facebook est devenu Meta, pour signaler un pivot vers le «métavers», présenté comme l’avenir de l’internet, un univers parallèle en réalité augmentée et virtuelle. La branche Facebook Reality Labs, qui mène les grands travaux, a perdu plus de 10 milliards de dollars bien réels en 2021. «Notre direction est claire mais le chemin n’est pas encore parfaitement défini», a reconnu Mark Zuckerberg. Cette stratégie divise les observateurs, entre les enthousiastes qui croient à ce pari sur le long-terme et ceux qui n’en voient pas le potentiel. «On ne sait pas comment ils vont en tirer des revenus, si les consommateurs vont s’en servir et comment les régulateurs vont réagir», a commenté l’analyste Carolina Milanesi. «Sans compter le risque que le harcèlement, la désinformation et les problèmes de confidentialité sur Facebook ne se transfèrent sur le métavers».

–  Les élus en embuscade : Comme Google, Apple et Amazon, Meta fait face à de nombreuses enquêtes et  plaintes pour pratiques anticoncurrentielles. Des élus américains planchent en outre sur une réforme des lois antitrust, dans l’idée de pouvoir procéder à des démantèlements.