Des vocaux aux émojis, les alternatives aux messages écrits s’intensifient

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Plus besoin de pianoter sur son mobile pour un simple «OK»: du pouce format «émojis» aux messages vocaux facilités par les messageries en ligne, les alternatives aux messages écrits s’intensifient. Chauffeur de VTC à Lagos, la vibrante et connectée capitale économique du Nigeria, Ali Gambo ne jure que par la messagerie en ligne WhatsApp pour échanger avec ses amis. «Je ne me rappelle même plus la dernière fois que j’ai envoyé un SMS», raconte ce jeune homme de 27 ans, dont le travail l’oblige à avoir une connexion internet constante. Avec son groupe d’amis, tous privilégient WhatsApp pour échanger «parce que tu peux partager du contenu autre que du texte, comme des photos ou des vidéos», dit-il. Lui préfère communiquer par message, mais certains de ses amis adorent envoyer des «notes vocales», car «ils sont plus à l’aise à l’oral qu’à l’écrit».

Fati Abubakar, photographe nigériane de 36 ans, raffole aussi de cette fonctionnalité qui consiste à enregistrer sa voix, de quelques secondes à plusieurs minutes pour les messages les plus longs, via le micro de son smartphone. «J’aime les messages vocaux parce que quand je suis trop paresseuse pour taper (un message écrit), raconte-t-elle, je peux juste enregistrer et envoyer, ou quand je veux décrire quelque chose mais que l’écriture ne le ferait pas de manière appropriée, je peux juste enregistrer et c’est plus facile». «Je n’utilise les notes vocales que pour rire aux blagues amusantes dans les discussions de groupe, mais dans l’ensemble, je préfère les «textos»», confie de son côté Idem Temitayo Ayorinde, 30 ans, créateur de podcasts. Dans ses communications écrites, il dit aussi utiliser des «émojis» pour remplacer des expressions nigérianes de tous les jours comme «Abeg» («je t’en prie», en pidgin) qu’il a remplacé par deux paumes de mains tournées vers le ciel.

D’une centaine à leurs débuts en 1999 à plus de 3.500 aujourd’hui, les «émojis» sont devenus tellement incontournables dans nos manières de communiquer que celui du «visage avec des larmes de joie» a même été désigné en 2015 mot de l’année par les dictionnaires Oxford. «L’émoji n’est pas un concurrent de l’écrit, c’est une forme d’écrit», souligne Jean-Michel Huet, spécialiste des télécoms au sein du cabinet BearingPoint et de l’histoire du SMS.

En Chine, la plupart des communications sur la «super app» WeChat (1,3 milliard d’utilisateurs actifs mensuels dans le monde) privilégient encore l’écrit, bien que les «émojis» soient aussi largement utilisés et que l’application dispose aussi d’une fonction de messagerie vocale. Il y existe également une culture dynamique de partage de «mèmes», ces montages humoristiques viraux sous forme de photos légendées ou de «gifs» (image animées), autres éléments de la nouvelle grammaire des communications modernes. «Il y a un phénomène de retour de l’oralité», complète encore Jean-Michel Huet, citant le succès éphémère qu’a connu le réseau social 100% audio «Clubhouse» durant le confinement, les «Spaces» sur Twitter ou encore «le boom des assistants vocaux». «L’intérêt du SMS et des messages écrits par rapport au vocal, c’est la discrétion, souligne-t-il. Vous pouvez l’écrire en cours, au bureau, en famille, ou en voiture, sans vous faire remarquer. Si vous utilisez un «vocal» en réunion, les gens vont l’entendre». Message reçu !