Entretien avec Takis CANDILIS, PDG de Lagardère Entertainment

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A ce jour, il existe une suprématie des séries américaines. Que manque-t-il à la France pour qu’elle puisse proposer des séries d’envergure internationale ?
Takis CANDILIS
Pendant des années, la France a vécu un eldorado. Nous étions dans un pays clôturé qui fonctionnait avec des quotas de production et de diffusion qui ont fait émerger une industrie de la fiction en France. A un moment donné, plusieurs crises ont éclaté en même temps. Une crise technologique tout d’abord avec la multiplication des écrans et l’arrivée de la TNT. Une crise éditoriale ensuite, avec des chaînes de télévision qui programmaient des œuvres internationales telles que «Les Experts» en face d’une petite copie française. La crise est également générationnelle car très peu de jeunes producteurs ont émergé. Il faut à tout prix recréer une nouvelle génération de talents. Pour terminer, la crise est financière car le marché publicitaire a connu une stagnation, puis une diminution de ses recettes et n’a pas retrouvé son niveau de 2008. Dès lors, les chaînes ont investi moins d’argent. Les solutions ? Se mettre à plusieurs, coproduire, s’ouvrir au monde.
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Quel est votre positionnement stratégique concernant le développement de vos productions ?
Takis CANDILIS
Je suis arrivé à Lagardère il y a trois ans, et nous avons tout de suite crée une structure dédiée à la production internationale. Trois ans après, trois séries internationales sont en production, avec d’un côté «Les Borgia» qui seront diffusés à l’automne sur Canal+, mais aussi «Death in Paradise» (8X52’) actuellement en tournage en Guadeloupe pour BBC1 et France 2 ; et enfin la série «Transporter» dont le tournage a démarré la semaine dernière.
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Quels sont les budgets de ces productions ?
Takis CANDILIS
«Les Borgia» disposent d’un budget de 25 millions d’euros, «Death in Paradise» de 18 millions d’euros et «Transporter: The Series» de 35 millions d’euros. Pour trouver ces budgets, nous devons nous ouvrir sur le monde. Pour «Transporter» par exemple, HBO et CinéMax ont intégré le financement.
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Quels avantages tirez-vous de la coproduction internationale ?
Takis CANDILIS
La coproduction internationale est une bulle d’air qui nous permet de nous renouveler, de nous confronter à d’autres talents, mais aussi de nous ouvrir à un marché mondial.
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Se dirige-t-on vers une production audiovisuelle plus industrialisée ?
Takis CANDILIS
Je pense que nous allons vers une production à plusieurs vitesses. Pendant près de 25 ans, les mêmes quotas de production ont finalement obligé les chaînes à investir sur la fiction de Prime. Aujourd’hui, les chaînes de TV ont moins d’argent, et les coûts de Prime sont trop élevés par rapport aux recettes publicitaires que les chaînes peuvent en attendre. Les diffuseurs devraient donc se rabattre vers une production industrielle d’après-midi. TF1, France 2, NRJ12 et W9 ont lancé des appels d’offre pour se lancer dans la production de Day Time. De plus, nous devrions probablement retrouver des rendez-vous de week-end comme à l’époque de «Sous le soleil». La fiction de Prime quant à elle, devrait devenir événementielle.