G. LOCHARD (Spliiit) : «Le co-abonnement est l’avenir de l’abonnement pour dépenser moins et profiter plus»

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Spliiit révolutionne la façon dont les consommateurs gèrent leurs abonnements digitaux. Lancée en 2019, la plateforme met en relation les particuliers et agit au quotidien pour rendre accessible au plus grand nombre les abonnements digitaux en toute légalité. Aujourd’hui, Spliiit est le leader en Europe sur ce marché du co-abonnement et ne cesse d’innover pour sécuriser les transactions. Son ambition ? S’étendre dans toute l’Europe dans les trois ans à venir. Entretien avec Guillaume LOCHARD, Cofondateur et DG de Spliiit.

Lancée en 2019, dans quelle mesure Spliiit a-t-elle pris de l’ampleur ?

Nous avons aujourd’hui plus de 700.000 inscrits sur la plateforme (spliiit.com/fr) et plus de 139.000 co-abonnements actifs. Le principe de réabonnement est bien présent, même s’il n’y a pas d’obligation d’engagement.

Rappelez-nous l’origine de la création de Spliiit ?  

Nous sommes trois co-fondateurs. L’un d’eux, Jonathan Lalinec, a apporté le concept initial. Sa femme partageait un abonnement avec une amie. Puis en voulant partager un deuxième abonnement tout en souhaitant greffer d’autres participants, il fallait équilibrer les comptes en faisant des micro-virements de quelques euros par mois entre les uns et les autres. Mais en 2019, il n’y avait ni solution, ni système pour démocratiser et simplifier le partage d’abonnements. Voilà comment est née Spliiit. On reprend la philosophie du covoiturage et nous l’étendons à l’univers des abonnements. Ainsi tout le monde fait des économies.

Dans un deuxième temps, une marketplace est née ?

Nous mettons effectivement en relation des propriétaires d’abonnements avec des gens intéressés par les services. Cela représente 80% de notre activité. Les 20% restants sont des usagers qui se connaissent déjà. Dès le départ, nous avons initié toutes les démarches auprès de la Banque de France (BNF) pour collecter l’argent de particuliers, le traiter, prendre une commission, et reverser à d’autres particuliers en l’occurrence les propriétaires d’abonnements. C’est une activité régulée par des obligations et des vérifications d’identité des personnes.

Spliiit est-il le leader en Europe sur cette activité ?

Oui, nous sommes leaders sur le marché européen, notamment en France, Belgique, Espagne et Italie. Depuis notre arrivée, quelques acteurs se sont lancés dans le sillage. L’entreprise la plus ancienne dans le secteur est italienne, Together Price, et couvre l’Italie et l’Espagne.

La question de la légalité se pose. Comment opérez-vous ?

Avant de rejoindre Spliiit, j’ai travaillé plus de dix ans chez Apple sur des questions de légalité et de conformité. Je ne me voyais pas lancer une activité qui n’était pas conforme et contraire aux intérêts des éditeurs. Tous les contenus référencés sur Spliiit sont vérifiés unilatéralement par notre équipe pour savoir s’ils sont éligibles au partage. Vous ne trouverez jamais d’abonnement «1 écran» partagé sur Spliiit, ce qui est contraire à la politique des éditeurs. On fonctionne avec des comptes multi-utilisateurs. Spliiit ne contrevient pas au droit d’auteur et ne porte pas non plus atteinte aux conditions contractuelles des plateformes.

Avez-vous rencontré les éditeurs ?

On a passé beaucoup de temps à les rencontrer pour leur expliquer les bienfaits de notre modèle. Pas seulement pour les particuliers – parce que l’on comprend évidemment le gain pour un propriétaire qui récupère une participation financière sans changer ses habitudes. Pour les éditeurs, il y a aussi beaucoup d’intérêts. Le premier, c’est que nous avons un taux de résiliation des propriétaires d’abonnement sur Spliiit aux alentours de 1%, ce qui est très faible par rapport au taux de résiliation que les éditeurs peuvent avoir en direct. Deuxième élément, nous amenons à monétiser des gens qui n’auraient jamais payé pour le service. Si Spliiit n’existait pas, 37% de nos utilisateurs se seraient privés du service et 29% se seraient tournés vers des sites illégaux. Troisième intérêt, on augmente la taille du marché payant.

Vous luttez donc à votre échelle contre le piratage ?

Ce n’était pas notre première vocation. Mais dans les faits, nous sommes une solution contre le piratage. L’Arcom – que nous avons rencontré –  nous perçoit comme tel.

Netflix a annoncé le lancement d’une fonctionnalité permettant à ses utilisateurs de partager leur compte en souscrivant à une option supplémentaire payante. Qu’en pensez-vous ?

Cette nouveauté s’inscrit dans une volonté de Netflix de récupérer des revenus auprès des 100 millions de foyers qui accèdent au catalogue sans payer. Ils officialisent le fait que le partage hors foyer est quelque chose d’incontournable. 90% des gens partagent leurs identifiants naturellement. Spliiit permet de réaliser jusqu’à 75% d’économies sur sa facture en partageant les frais de ses abonnements entre plusieurs utilisateurs. En France, sur un abonnement Netflix «Premium 4 écrans» à 18 €/mois, on reverse 4,50€ par co-abonné au propriétaire. En Espagne et au Portugal, Netflix vient de lancer un nouveau système avec un coût supplémentaire par membre en dehors du foyer à la charge du contractant. Nous sommes déjà en place et nous avons été les premiers à ajuster notre modèle afin d’être en conformité avec les nouvelles règles.

Spliiit, un modèle rentable ? 

On espère être à l’équilibre d’ici la fin de l’année. Par commission, nous prenons 35 centimes d’euros + 5% de chaque transaction mensuelle. Notre activité nécessite à la fois du volume et de la récurrence. Nous avons fait plus de 3,8 M€ de transactions en 2022. Notre chiffre d’affaires était à 600.000 € l’année passée et va certainement franchir le million d’euros en 2023. Le potentiel est important. On a commencé avec du divertissement et on a rajouté des verticales : 180 services sont référencés (SVOD, presse, musique, jeux vidéo, stockage cloud, logiciels, formations en ligne…). Le co-abonnement est l’avenir de l’abonnement pour dépenser moins et profiter plus.