Quelle médiatisation de l’espace entre 2009 et 2018 ?

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A l’approche des 50 ans des premiers pas de l’Homme sur la Lune, le nouveau baromètre des JT de l’Institut national de l’audiovisuel (INA) dévoile que l’espace, totalisant 0,6% de l’offre totale d’information, est un marronnier décennal devenu transmédiatique. De 2009 à 2018, 1.794 sujets ont abordé le thème de l’espace dans les JT du soir, soit 0,6% de l’offre totale d’information. Avec une médiatisation renforcée les années en 9, années de commémoration des premiers pas sur la Lune, le sujet du voyage dans l’espace atteint un pic en 2009 (241 sujets) : c’est «l’année mondiale de l’astronomie», qui a aussi vu les 30 ans d’Ariane, le lancement de divers satellites – de la sonde Kepler envoyée à la découverte de nouvelles planètes – une mission de mainte-nance sur le télescope Hubble… Les rédactions privilégient l’astronautique, avec 65% des sujets consacrés aux missions et projets d’exploration humaine (vols habités, actualité de la Station spa-tiale internationale, développement du tourisme spatial…). Les sciences de l’univers ne sont quant à elles présentes que dans 26% des sujets.

Attentifs à la géopolitique de la conquête spatiale, les JT font une place aux acteurs émergents du secteur, qui commencent pourtant à peine à se mesurer aux puissances traditionnelles que sont les États-Unis, la Russie, et la France. Les logiques médiatiques ne coïncident donc pas totalement avec les logiques économiques. Si les Etats-Unis, première puissance spatiale, arrivent en tête du top 15 des pays cités avec 386 sujets – suivis de la France en 2e position avec 306 sujets – les médias suivent de près l’arrivée dans la course de la Chine, premier pays à se poser sur la face cachée de la Lune en septembre 2018, l’Inde, qui a tiré en 2017 la première fusée produite localement, ou encore la Corée du Nord et l’Iran. C’est surtout la mission de Thomas Pesquet, de novembre 2016 à juin 2017, qui apparaît comme le phéno-mène médiatique majeur : par le nombre de ses prises de paroles, il se classe loin devant les autres figures du secteur (numéro 1 du top 20 des personnalités les plus médiatisées). Avec 158 sujets, sa mission à la Station spatiale internationale apparaît comme le sujet de prédilection de cette décennie. Si les réseaux so-ciaux ont joué le premier rôle dans sa communication – notamment Twitter qui a été utilisé par l’Agence spatiale européenne (ESA) – cer-taines chaînes telles que BFM TV (220 tweets et 7.000 mentions de la chaîne sur le sujet) ou Quotidien (2 invitations du spationaute en plateau, 5 tweets et 4.500 mentions) ont su se saisir de cet engouement dans le cadre d’une stratégie de couverture véritablement transmédia-tique.

Parmi les autres personnalités liées au domaine spatial les plus médiatisées, on retrouve des représentants de l’expertise française comme Jean-François Clervoy, Jean-Yves Le Gall et Francis Rocard – qui a coordonné la mise en œuvre du programme d’exploration de Mars – mais aussi de nouveaux acteurs du secteur des vols commerciaux et du tourisme spatial comme Richard Branson et Elon Musk. Cependant, alors que la question de la participation des femmes à l’aven-ture spatiale émerge dans le débat public, on constate que seulement 14% des personnes interviewées au total dans l’ensemble des sujets portant sur l’espace sont des femmes. Et parmi les 2 qui apparaissent dans le top 20, on compte… la compagne de Thomas Pesquet, Anne Mottet, et, seulement en 9e place, Claudie Haigneré, qui cumule pourtant les statuts de scientifique, spationaute et ancienne ministre.