Roman Polanski, auteur d’une oeuvre riche et non conformiste

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Figure majeure du 7e art, le cinéaste franco-polonais Roman Polanski est l’auteur d’une oeuvre riche et non conformiste multirécompensée, dont la vie n’a cessé d’être hantée par des drames personnels et l’affaire de viol sur une mineure qui le poursuit depuis 40 ans. Réalisateur, acteur, scénariste et producteur, Roman Polanski, 83 ans, a bâti en une vingtaine de longs métrages une oeuvre souvent dérangeante, tourmentée et pessimiste, marquée par des thématiques comme l’enfermement et la perversion, et d’une grande maîtrise technique. Elle est jalonnée de films marquants : «Répulsion» (1965), «Cul de sac» (1966), «Le Bal des vampires» (1967), «Rosemary’s Baby» (1968), «Chinatown» (1974), «Le Locataire» (1976), «Tess» (1979), «Le Pianiste» (2002) ou «The Ghost Writer» (2010).  Reconnu par ses pairs et récompensé à travers le monde, il a notamment obtenu la Palme d’or à Cannes en 2002 et l’Oscar du meilleur réalisateur en 2003 pour «Le Pianiste», 2 fois le César du meilleur film pour «Tess» et «Le Pianiste», et quatre fois celui du meilleur réalisateur. Sa vie a aussi été émaillée de drames. Né le 18 août 1933 à Paris de parents juifs polonais qui retournent en Pologne alors qu’il n’a que 3 ans, Roman Polanski est marqué par son enfance dans le ghetto de Cracovie. Il évite de justesse la déportation, contrairement à ses parents et à sa demi-soeur. Sa mère, enceinte, ne reviendra pas d’Auschwitz. Après bien des tribulations dans Cracovie, il est confié à une famille de paysans jusqu’à la fin de la guerre. Il tirera de cette expérience son film le plus personnel, «Le Pianiste», où Adrien Brody campe un survivant du ghetto de Varsovie. «J’ai parfois l’impression, dira-t-il, que tout ce que j’ai fait avant était une espèce de répétition du «Pianiste»». Diplômé de l’institut du cinéma de Lodz (Pologne) en 1959, le jeune Roman Polanski commence sa carrière en 1962 avec un thriller psychologique, «Le Couteau dans l’eau», mal vu dans son pays mais qui lui ouvre les portes de l’Occident. Le succès en 1965 de «Répulsion», avec Catherine Deneuve en meurtrière démente, lui donne un passeport pour Hollywood. L’aventure américaine dure une décennie, parcourue de bonheurs – succès, mariage avec l’actrice Sharon Tate rencontrée sur le tournage du «Bal des Vampires» – et de cauchemars. Le 9 août 1969, alors qu’il se trouve à Londres, son épouse, enceinte de huit mois, est retrouvée assassinée à Los Angeles avec 4 de ses amis par des satanistes disciples de Charles Manson. «La mort de Sharon est la seule ligne de partage qui ait réellement compté dans ma vie», écrit Polanski dans son autobiographie en 1984. Huit ans plus tard, à 43 ans, sa vie bascule à nouveau lorsqu’il est poursuivi pour une affaire de viol sur une adolescente de 13 ans. Le cinéaste, qui plaide coupable de «rapports sexuels illégaux» avec une mineure mais nie le viol, s’enfuit avant le verdict en 1978 des États-Unis, où il n’a jamais remis les pieds depuis. Il sera rattrapé par cette affaire à plusieurs reprises, notamment en 2009, quand il est arrêté en Suisse à la demande de la justice américaine et assigné à résidence, avant que la Suisse ne refuse de l’extrader. En décembre, c’est la Cour suprême polonaise qui a mis fin à une procédure d’extradition entamée à la demande américaine. Roman Polanski s’installe définitivement en France à la fin des années 70, poursuivant son parcours entre succès («Tess») et fiasco («Pirates»). Après plusieurs échecs au box office («Lunes de fiel», «La 9ème porte»), il revient au 1er plan au début des années 2000 avec «Le Pianiste», puis en 2010 avec le thriller «The Ghost Writer». En 2014, il reçoit le César du meilleur réalisateur pour «La Vénus à la fourrure», huis clos sadomasochiste entre un metteur en scène et une actrice, interprétée par sa femme Emmanuelle Seigner, avec qui il a 2 enfants. Il tourne actuellement «D’après une histoire vraie», adaptation d’un roman de Delphine De Vigan avec Emmanuelle Seigner et Eva Green.