Sur le web, un site peut en cacher un autre

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Un site peut en cacher un autre: le très populaire portail d’aide à la vaccination contre le Covid-19 «Vite Ma Dose» est imité en ligne par un site éponyme, qui promeut un discours «vaccino-prudent». Fréquents sur le web, les litiges pour détournement d’adresse touchent plus d’une centaine d’entreprises chaque année en France. Fondé début avril par l’ingénieur Guillaume Rozier et entretenu depuis grâce à une centaine de bénévoles, le site officiel «Vite Ma Dose» (https://vitemadose.covidtracker.fr/) permet de visualiser en un coup d’oeil les créneaux disponibles pour la vaccination sur les différentes plateformes de rendez-vous (Doctolib, Keldoc, Maiia, etc.). Sa déclinaison en application sur smartphones est parmi les plus téléchargées de France. Mais sur la Toile, une autre adresse quasi similaire («vitemadose» suivi de «.fr»), renvoie vers une page qui ne propose aucun rendez-vous vaccinal. Elle émet à l’inverse des réserves sur la campagne de vaccination actuelle, en affichant, pendant plusieurs jours cette semaine, une vidéo du biologiste Christian Vélot évoquant les «risques potentiels de la nouvelle génération de vaccins» et se présentant comme «vaccino-prudent». Cette adresse a été réservée dès le 3 avril 2021 au nez et à la barbe de Guillaume Rozier, qui l’avait laissée vacante. M. Rozier dénonce une «usurpation» et prépare «toutes les procédures possibles» pour la récupérer, a-t-il dit. «Tout ce qui m’importe c’est que les gens trouvent le bon site. Mais je ne sais pas comment ça peut évoluer», le propriétaire de cette adresse éponyme «pourrait faire payer les gens, les arnaquer par exemple», suppose l’ingénieur informatique. Si le dépôt d’un nom de domaine (adresse web) ne coûte que 4,80EUR, un site peut se revendre très cher. M. Rozier affirme avoir vu courant avril des annonces tentant de revendre l’adresse incriminée à «6.000 euros». Il a tenté, mais en vain, de la racheter à prix coûtant à celui qui l’avait enregistrée initialement. Ce genre de mésaventures est courant dans le monde de l’entreprise ou chez des personnalités, dont le nom est utilisé comme adresse web à leurs dépens, explique Pierre Bonis, directeur de l’Afnic, l’association française chargée de la gestion des noms de domaine se terminant en .fr. En parallèle aux procédures judiciaires classiques, plus longues, l’Afnic règle des centaines de litiges de ce type chaque année, dont 80% concernant des entreprises. Après deux mois d’examen, les décisions de l’Afnic peuvent aboutir à la suppression définitive du site, ou à sa ré-attribution au plaignant qui la réclame, preuves à l’appui. Car sur le web, si le «principe général du premier arrivé, premier servi» prévaut dans l’usage, «ce n’est pas le Far West non plus», explique l’avocat Alexandre Archambault, spécialiste du numérique. La loi française punit le «cybersquatting», assimilé à du rançonnage, dans les cas où un nom de domaine est réservé dans le but de le revendre plus cher à son propriétaire légitime. Elle interdit aussi l’usurpation d’identité ou encore l’utilisation d’adresses trop proches du nom d’institutions ou services de l’Etat. Si un nom de domaine est susceptible de porter atteinte «à l’ordre public» ou «à la propriété intellectuelle’», il peut également être supprimé ou ré-attribué. Dans ce 2ème cas, le plaignant devra démontrer, par exemple, qu’il avait déposé une marque du même nom avant l’enregistrement du site contesté, qu’on a cherché à profiter de sa notoriété ou tenté de lui nuire, détaille Me Archambault. Mais pour éviter ce genre de procédures, parfois complexes, le meilleur moyen pour une entreprise est de «réserver 4 ou 5 noms de domaines, avec les variants, en rajoutant un tiret par exemple» et de «ne jamais communiquer» sur un projet de site «avant de l’avoir enregistré», prévient M. Bonis.