Telecom Italia: feu vert à la scission du groupe

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Les administrateurs de Telecom Italia ont approuvé mercredi le plan stratégique 2022-2024 du nouveau PDG, Pietro Labriola, qui s’apparente à un projet alternatif à l’offre de rachat soumise en novembre par le fonds d’investissement américain KKR et prévoit la scission du groupe. La présentation du très attendu plan par M. Labriola a été cependant ternie par la publication d’une perte nette abyssale de 8,65 milliards d’euros pour 2021, en raison d’importantes dépréciations d’actifs. Cette perte, qui tranche avec un bénéfice net de 7,22 milliards d’euros en 2020, gonflé par une aubaine fiscale, s’inscrit dans le cadre d’un grand nettoyage du bilan marquant la rupture avec la stratégie menée par son prédécesseur Luigi Gubitosi. Le piètre résultat de 2021, qui est bien pire qu’attendu par les analystes, est dû à une dépréciation d’actifs de 4,1 milliards d’euros et un effet fiscal négatif de 3,8 milliards d’euros. Autre défi à relever, Telecom Italia doit désormais faire face à une concurrence accrue sur le marché de la téléphonie fixe déjà très disputé avec l’arrivée sur ce segment du groupe français Iliad qui a promis de casser les prix. M. Labriola s’est déclaré «convaincu que l’évolution prévue pour le groupe constitue une rupture positive avec le passé», commentant ainsi son plan stratégique. Quant à la manifestation d’intérêt de KKR, qui s’est dit prêt à débourser 10,8 milliards d’euros pour racheter Telecom Italia, son «évaluation par les conseillers sera finalisée sous peu», selon le groupe. Cette offre a été jugée trop basse par Vivendi, principal actionnaire de l’opérateur avec une part de 23,75%. L’action avait chuté de 9% mardi après des spéculations sur un possible abandon du projet d’OPA. Du coup, le titre qui s’était envolé après l’offre de KKR, a renoué avec le niveau d’avant, soit autour de 0,343 euro, nettement en-dessous de l’offre de 0,505 euro l’action du fonds américain. «Le marché continue de réagir avec frustration, voyant s’amenuiser les chances d’une offre en espèces qui offrirait une prime d’environ 50% par rapport au cours actuel de l’action», ont jugé les analystes de Banca Akros. Le nouveau plan stratégique prévoit une scission entre le réseau de téléphonie fixe, donc l’infrastructure, et les activités de services, visant à mieux valoriser chacune des futures entités. M. Labriola remplace depuis fin janvier Luigi Gubitosi, poussé vers la sortie par Vivendi, qui le soupçonnait d’être allé chercher KKR en vue d’une offre de rachat. Le limogeage de l’ancien patron a changé la donne par KKR, qui voit s’éloigner la perspective d’une OPA. Si le fonds attend toujours une réponse officielle avant d’envisager d’autres options, il ne ferme pas la porte à des négociations. La future entité concentrée sur l’infrastructure, la NetCo, devrait comprendre le réseau en fibre et en cuivre de Telecom Italia ainsi que la société de câble sous-marin Sparkle. Ce plan relance le projet d’une fusion du réseau de TIM, FiberCop, avec celui de son rival OpenFiber, sous l’égide de la Caisse des dépôts italienne (CDP), qui détient des parts dans les deux sociétés. Le fonds américain aura de toute manière son mot à dire, car il possède déjà 37,5% de FiberCop, une co-entreprise détenue avec TIM et le fournisseur d’accès à internet Fastweb qui développe la fibre optique dans la péninsule. KKR, qui avait versé 1,8 milliard d’euros à TIM en avril 2021 pour acquérir sa part, avait, lui aussi, envisagé une séparation des deux branches afin de créer de la valeur pour les actionnaires. La ServiceCo, qui garde les activités de services, devrait pour sa part rassembler les autres filiales comme TIM Brasil, Noovle (stockage des données), Olivetti (informatique), Telsy (cybersécurité) ou encore Timvision (distribution de films en ligne). L’Etat est présent au capital de Telecom Italia à travers une part de 9,81% de la Caisse italienne des dépôts, qui a accueilli favorablement le plan stratégique de M. Labriola, à l’unisson avec Vivendi.