Zemmour jugé pour ses propos sur les migrants mineurs

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«Voleurs, assassins, violeurs»: le polémiste d’extrême droite Eric Zemmour, qui ne cache pas ses ambitions présidentielles pour 2022 mais ne s’est encore pas déclaré candidat, sera jugé mercredi pour ses propos sur les mineurs isolés. Habitué des sorties controversées, Eric Zemmour est cette fois cité à comparaître par le parquet pour complicité de provocation à la haine raciale et d’injure raciale pour des propos tenus sur la chaîne Cnews le 29 septembre 2020. Lors d’un débat de l’émission «Face à l’info» sur les mineurs isolés après un attentat devant les ex-locaux de «Charlie Hebdo», le chroniqueur avait déclaré: «ils n’ont rien à faire ici, ils sont voleurs, ils sont assassins, ils sont violeurs, c’est tout ce qu’ils sont, il faut les renvoyer et il ne faut même pas qu’ils viennent». M. Zemmour, qui a quitté l’émission quotidienne phare de Cnews mi-septembre, n’a fait que «redire avec des mots différents» les inquiétudes exprimées par les autorités sur la délinquance liée aux mineurs non accompagnés, estime Me Pardo. L’audience aurait dû se tenir le 8 septembre mais a été renvoyée en raison du grand nombre de parties civiles. Une trentaine d’entre elles se sont constituées, dont les associations SOS Racisme, la Ligue des droits de l’Homme (LDH) et la Maison des Potes, ainsi qu’une vingtaine de conseils départementaux, les mineurs non accompagnés étant pris en charge par l’aide sociale à l’enfance, gérée par les départements. «Il s’agit de jeunes qui ont le droit à la protection et à un accueil digne», a déclaré le président (PS) du conseil départemental de Seine-Saint-Denis Stéphane Troussel, constitué partie civile «car nous ne pouvons tolérer les amalgames et le racisme dont ce fossoyeur de la république est coutumier». «Que viennent faire les conseils départementaux dans cette affaire ?», a critiqué la défense de M. Zemmour. «C’est de la pure politique s’ils sont là». Les propos tenus à l’antenne sont «absolument intolérables» et laissent entendre que «tout mineur isolé est un délinquant en puissance qui vient en France pour commettre des exactions», a estimé l’avocat de SOS Racisme, Me Patrick Klugman. «C’est l’essence même du racisme». Comme c’est l’usage dans les procès de presse, le patron de Canal+ sera jugé aux côtés de M. Zemmour, en tant que diffuseur des propos. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a d’ores et déjà sanctionné en mars la chaîne d’information d’une amende de 200.000 euros, pour «incitation à la haine» et «à la violence». «Contrainte» par une décision du CSA, Cnews avait annoncé mi-septembre que M. Zemmour, locomotive des audiences depuis son arrivée sur la chaîne en 2019, n’interviendrait plus dans l’émission. Plusieurs voix s’étaient auparavant élevées pour dénoncer la tribune offerte chaque jour à un potentiel candidat à la présidentielle. Selon des sources proches du polémiste d’extrême droite, Eric Zemmour, 63 ans, avait été recruté en pleine polémique après une violente diatribe contre l’islam et l’immigration lors d’un rassemblement politique, et les plaintes à son encontre pour des propos tenus pendant ses émissions se sont ensuite multipliées. Le polémiste, qui a débuté en tant que journaliste, s’est fait connaître dans les années 2000 par ses interventions télévisées dans «On n’est pas couché» de Laurent Ruquier sur France 2. Ses prises de position lui ont valu depuis une dizaine d’années une quinzaine de poursuites en justice. Plusieurs fois relaxé, il a été condamné à deux reprises pour provocation à la haine. Selon un rapport parlementaire publié en mars, environ 10% des mineurs isolés étrangers recensés en France ont commis des actes de délinquance. Il s’agit surtout de vols de rue, dans les transports en commun, parfois avec violences, ou de vols par effraction, en 1er lieu dans les pharmacies, beaucoup d’entre eux étant toxicomanes.