1984 : Canal Plus inaugure une nouvelle ère de diffusion footballistique

Le 9 novembre 1984, cinq jours après son lancement, Canal Plus diffusait le premier match de football de son histoire, une victoire de Nantes sur Monaco (1-0) en championnat, en imprimant immédiatement la «patte» que la chaine cryptée allait adopter lors de ses retransmissions sportives. «Je ne me souviens pas de tous les matches que j’ai commentés mais celui-là, je ne l’oublierai jamais», rembobine Michel Denisot qui commentait la rencontre avec Charles Biétry. «On avait l’impression que c’était un gros enjeu pour nous, pour la chaîne aussi. Nous nous sommes beaucoup parlés, Charles et moi, avant la rencontre. De choses très personnelles, intimes, de nos pères respectifs». Les deux hommes s’étaient beaucoup battus aux côtés de Jean-Claude Darmon, ex-grand argentier du foot français, pour convaincre les présidents de clubs que l’arrivée de la télévision n’allait pas «vider les stades de leurs spectateurs». Daniel Bravo, 21 ans à l’époque et joueur à Monaco, ne se rappelle pas vraiment de la rencontre perdue par les siens après un but de la tête de Vahid Halilhodzic sur une passe de José Touré, mais en garde quelques souvenirs tout de même. «De Charles Biétry surtout», détaille l’ex-attaquant, ancien consultant de Canal Plus, désormais chez beIN Sports. «De ses interviews avant le match dans le couloir menant à la pelouse. De son micro avec un long fil. De sa visite à notre hôtel la veille de la rencontre pour prendre ses infos. Tout cela était nouveau». Maxime Bossis, capitaine de FC Nantes, assure pourtant que la présence des caméras ce jour-là, n’avait pas changé la préparation de la rencontre. «Je pense néanmoins que chaque joueur, sachant qu’il était filmé, voulait encore moins se manquer sur le match». Parce que dès sa première retransmission, Canal Plus a voulu faire d’un match de football un véritable spectacle. «L’idée», reprend Michel Denisot, «c’était de faire vivre au plus près les matches de foot, de mettre plus de caméras, de travailler sur le son pour entendre le bruit des crampons dans un couloir, celui du ballon au moment d’une frappe. On voulait faire vivre à nos abonnés le match pendant, avant et après. A la mi-temps, on entrait dans les vestiaires. On avait accès partout».

«Au plus près des acteurs» : Pour cette première rencontre, Denisot avait convaincu le réalisateur Jean-Paul Jaud avec qui il avait travaillé sur TF1, mais un peu bridé sur la première chaine, de le rejoindre dans l’aventure Canal. Jaud ou le premier réalisateur d’une longue lignée sur la chaine cryptée. «A l’époque, il y avait déjà l’idée qui nous accompagne encore aujourd’hui, lorsqu’on réalise une rencontre, de respecter le jeu et de tenter d’expliquer et d’analyser la rencontre au plus près de ses acteurs», explique Laurent Lachand, l’un des réalisateurs phares de Canal+. «Si on dispose évidemment d’autres moyens technologiques aujourd’hui, on souhaite toujours être au coeur des choses». S’il n’était pas né en 1984, Paul Tchoukriel, l’un des commentateurs de la chaine, a revu ce Nantes-Monaco «des dizaines de fois et la façon +canalienne+ de retransmettre était la même qu’aujourd’hui», affirme-t-il. «On a toujours la même ambition de faire de notre abonné, le 12e joueur de foot, le 16e de rugby, le copilote de Formule 1». Si Canal+, diffuseur historique du championnat de France, possède les droits de la Ligue des champions, la chaine ne diffuse plus directement, pour la première fois depuis 40 ans, de Ligue 1. Elle propose à ses abonnées, via un un accord de distribution avec beIN sports, le match diffusé par la chaine qatarienne le samedi à 17h. «A l’époque, Canal était une chaine, c’est désormais une plateforme de distribution», explique Michel Denisot. «Je ne veux pas rentrer dans le débat, mais le foot comme le cinéma sur Canal, c’est indissociable. Ne plus en voir, c’est curieux».