Audiovisuel/ cinéma: le soutien à la production critiqué

376

 

Dépenses pas assez maîtrisées, «performances décevantes» pour la télé par rapport aux investissements, «risques d’essoufflement» dans le cinéma: la Cour des comptes épingle dans un rapport le soutien à la production, cinématographique et audiovisuelle. La Cour avait déjà demandé en 2012 un pilotage budgétaire précis du Centre national du cinéma (CNC). Dans ce nouveau rapport, intitulé «Les soutiens à la production cinématographique et audiovisuelle, des changements nécessaires», rendu public mercredi, elle revient à la charge sur les mécanismes de financement public du secteur, créés à la fin des années 50 pour le cinéma et dans les années 80 pour la télévision. «La dépense publique en faveur du secteur, en forte croissance depuis dix ans, est insuffisamment maîtrisée», estime-t-elle. Les aides directes – aides à la production versées par le CNC, dépenses fiscales… – ont crû de 88% en dix ans à 601 millions d’euros en 2012, «sans découler d’une priorité explicite en faveur de ce secteur, assortie d’objectifs précis et d’évaluation des résultats», souligne-t-elle. La Cour se montre particulièrement sévère à propos de l’audiovisuel, qui «bénéficie d’un système de soutien sans équivalent en Europe» avec près de 800 millions d’euros d’investissements des chaînes de tv en 2012 et des aides publiques à hauteur de 332 millions d’euros. Il affiche pourtant des «performances» sans «rapport avec les montants investis». Elle pointe notamment du doigt le secteur de la fiction (téléfilms et séries) «peu performant». Quant aux documentaires, la progression des volumes aidés au cours des dernières années «n’est pas en rapport avec leur audience», juge-t-elle. La Cour déplore aussi une tendance à «l’émiettement du secteur» de la production audiovisuelle, estimant que le soutien public «a manqué son objectif de consolidation» de celui-ci. Face à ce constat, la Cour préconise notamment de «relever le seuil d’accès au soutien automatique» dans l’audiovisuel ou de «prendre en compte les résultats obtenus par les programmes aidés dans l’octroi du soutien automatique du CNC». 

Elle recommande aussi de «procéder à un resserrement des critères de qualification du documentaire susceptible d’être aidé», ou de «consacrer une part plus importante des aides sélectives du CNC à la phase d’écriture». Concernant le cinéma, la Cour des comptes estime que le modèle «original» et à «succès» de financement français est «sous tension» et connaît «des risques d’essoufflement». Ces menaces sont liées notamment à «une hausse des coûts pour une partie de la production», largement soulignée depuis le débat lancé fin 2012 par le producteur Vincent Maraval sur l’inflation des budgets des films. Elles découlent aussi d’«une saturation des fenêtres de diffusion des films», alors que la fréquentation en salles est concentrée sur quelques succès et que les films sont moins qu’avant des produits d’appel à la télévision, indique-t-elle. S’appuyant sur ce bilan, la Cour fait un certain nombre de préconisations, reprenant en partie celles du rapport Bonnell pour adapter le modèle français du cinéma à l’heure du numérique. Elle recommande de «réduire le nombre de projets éligibles», de «plafonner la prise en charge par le soutien public des rémunérations les plus élevées», ou encore d’«assouplir le régime des jours pendant lesquels la diffusion d’oeuvres cinématographiques est interdite sur les chaînes de télévision».