BFMTV déboutée et condamnée face à un afficheur varois qui avait détourné sa marque

234

«La police vous parle tous les jours sur BFMTV»: condamné en référé en juin 2019 pour deux affiches publiques portant ce slogan, un afficheur varois a été blanchi lors du procès sur le fond, obtenant même la condamnation de la chaîne d’information.

Dans son jugement jeudi, le tribunal judiciaire de Marseille a débouté BFMTV de l’ensemble de ses demandes et condamné la chaîne aux dépens ainsi qu’au paiement de 10.000 euros à Michel-Ange Flori pour ses frais de procédure. Il a assorti sa décision d’une exécution provisoire, «compte tenu de l’ancienneté de l’affaire».

Exploitant jusqu’en 2016 de 400 panneaux publicitaires dans le Var, M. Flori avait conservé deux de ces panneaux, sur les communes de Toulon et de La-Seyne-sur-Mer, qu’il utilisait depuis 1999 pour sa communication personnelle, à coups de messages et d’affiches parodiques.En mai 2019, ce fervent soutien des «gilets jaunes» avait ainsi publié un dessin de mai 68 d’un CRS armé au micro de l’ORTF, accompagnée de ce message «La police vous parle tous les jours sur BFMTV». Se prévalant d’une atteinte à sa marque, la chaîne avait été confortée par l’ordonnance de référé du tribunal de Marseille, le 5 juin 2019, qui avait condamné l’afficheur à lui verser 30.000 euros à titre de provision sur le préjudice subi. Ce slogan constitue «un message avilissant, qui porte de manière certaine atteinte à l’image de BFMTV (…), la liberté de parodie ou de caricature n’étant pas applicable au droit des marques», avait conclu cette ordonnance. Jugeant là sur le fond, le tribunal judiciaire de Marseille fait une autre analyse, estimant que BFMTV «agit sur le fondement de la contrefaçon de sa marque» et qu’il faut que le prévenu ait obtenu «un avantage économique» pour que la contrefaçon soit constituée. Or M. Flori «n’a retiré aucun gain ni aucun avantage économique» de la diffusion de cette affiche, estime-t-il.

«Michel-Ange Flori a agi dans un but d’information, fut-il polémique», estime le jugement: «Cette affiche s’inscrit en effet dans le contexte du mouvement social dit des «gilets jaunes» et vise à critiquer les médias d’information continue et spécialement de la chaîne BFMTV». M. Flori a annoncé qu’il allait aussitôt republier cette même affiche sur ses deux panneaux de communication personnelle, accompagnée de la mention de la condamnation de BFMTV.

En décembre, M. Flori, 64 ans, avait également été blanchi par la Cour de cassation pour deux affiches qui caricaturaient Emmanuel Macron en Hitler ou en Pétain. La cour avait estimé qu’il n’avait «pas dépassé les limites admissibles de la liberté d’expression».

En première instance et en appel il avait été condamné pour «injures publiques» au président de la République. Sur la première affiche visée, révélée le 19 juillet 2021, Emmanuel Macron était représenté sous les traits d’Adolf Hitler, petite moustache et uniforme nazi, avec ce slogan: «Obéis, fais-toi vacciner».

Un mois plus tard, une nouvelle affiche représentait M. Macron au côté du maréchal Pétain, vêtu et coiffé du même képi, sur fond de QR code, avec ce message: «Il n’y a qu’un pass à franchir».