Burkina: l’incontournable festival du cinéma africain Fespaco s’ouvre samedi à Ouagadougou, malgré l’insécurité

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La 28ème édition de l’incontournable festival du cinéma africain, le Fespaco, s’ouvre samedi à Ouagadougou, capitale du Burkina Faso, avec pour thème principal «la paix» au moment où la violence jihadiste ensanglante plus que jamais le pays. C’est le 1er Fespaco depuis la prise de pouvoir des militaires au Burkina, lors de 2 coups d’Etat en 2022, le 1er en janvier, le 2ème en septembre. Quelque 10.000 festivaliers sont attendus, selon Haby Ouattara, coordinatrice du Fespaco (Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou), qui se tient tous les deux ans. «On est agréablement surpris, ça nous encourage et ça nous réconforte», ajoute-t-elle, tout en reconnaissant que la situation sécuritaire est dans toutes les têtes. Selon Mme Ouattara, la fragilité du pays liée aux attaques jihadistes «a influencé l’organisation du festival», notamment le dispositif de sécurité, qu’elle ne souhaite pas détailler. Le thème de cette 28ème édition – «cinémas d’Afrique et culture de la paix» – a été choisi en conséquence, pour coller à «l’actualité», précise-t-elle. Plusieurs films ont pour sujet principal «le terrorisme», comme «L’envoyée de Dieu» de la Nigérienne Amina Abdoulaye Mamani et «Epines du Sahel» du Burkinabè Boubakar Diallo. «Les créateurs sont toujours influencés par ce qu’ils voient», explique Haby Ouattara. Et malgré l’insécurité, le festival a choisi de délocaliser certains évènements. Habituellement, les films sont projetés dans différents endroits de la capitale et de sa périphérie, «pour donner accès au cinéma à des gens qui ne l’ont pas». Cette fois, ils s’étendront jusqu’à d’autres villes, auprès des personnes déplacées par la violence jihadiste. «On ne peut pas faire comme si ces personnes n’existaient pas. On veut les faire rêver, leur permettre de s’évader», pointe Haby Ouattara. Les violences liées aux attaques jihadistes, qui se sont multipliées ces derniers mois, ont fait plus de 10.000 morts au Burkina Faso depuis 2015, selon des ONG, et quelques deux millions de déplacés. Le Mali «symbole de résilience» pour les organisateurs, est l’invité d’honneur du Fespaco 2023. Comme le Burkina, ce pays voisin est ciblé par des attaques jihadistes et dirigé par des militaires putschistes. L’équipe du Fespaco rappelle que plusieurs films maliens ont été primés par le passé, et que le cinéma trouve toujours sa place dans ce pays, malgré le contexte politique. Cette année, 170 oeuvres ont été sélectionnées en compétition officielle, dont 15 longs métrages de fiction en lice pour briguer l’Etalon d’or du Yennenga, un trophée et un prix d’une valeur de 20 millions de francs CFA (environ 30.000 euros). Cette récompense suprême du festival porte le nom de la princesse fondatrice du royaume des Mossis, ethnie majoritaire au Burkina Faso. Le jury qui le décernera sera présidé par la productrice tunisienne Dora Bouchoucha. Le Cameroun et la Tunisie sont les pays les plus représentés, avec deux films chacun. Les autres sont originaires du Burkina, du Sénégal, d’Egypte, du Nigeria, du Mozambique, d’Angola, du Kenya, de l’Ile Maurice, du Maroc et d’Algérie. Un film de la République dominicaine a également été retenu. En marge des projections, sont prévus comme lors de chaque édition des rencontres entre producteurs, distributeurs, réalisateurs et diffuseurs, des ateliers d’accompagnement à l’écriture et au développement, des colloques et des débats. Cette édition célèbrera le centenaire de la naissance du réalisateur sénégalais Ousmane Sembène, figure emblématique du cinéma africain mort en 2007. La biennale du Fespaco, qui durera jusqu’au 4 mars, présente depuis 1969 des films de réalisateurs africains et de la diaspora.