Entre BeIN Sports, Netflix et OCS, Canal+ attaquée de toute part

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Entre la chaîne qatarie BeIN Sports, qui rafle les droits sportifs, et l’arrivée attendue de l’américain Netflix, qui offre films et séries en ligne, sans oublier le bouquet de chaînes cinéma et séries d’OCS, tous à bas prix, Canal+ est attaquée sur ses 2 piliers historiques. 

Les quelque 6 millions d’abonnés à Canal+, qui paient 39,90 euros par mois, pourraient se laisser séduire par ces nouveaux acteurs qui, pour 7 à 12 euros par mois sans engagement, segmentent le marché entre sport d’un côté et fiction de l’autre. D’autant que BeIN, OCS et Netflix, attendue à l’automne, disposent tous de gros moyens pour rafler à Canal+ matches phare et séries cultes. Or pour les milieux du cinéma comme pour ceux du sport, Canal+ est un financeur capital qu’il faut protéger, même si l’arrivée d’une concurrence présente aussi des avantages. En moins de 2 ans, BeIN (11 euros/mois), qui a racheté de nombreux droits sportifs, a déjà conquis 1,7 million d’abonnés et vise rapidement les 2 millons. OCS (12 euros/mois), dopée par l’ajout d’une chaîne de séries cet automne et l’achat pour 5 ans des séries réputées d’HBO, comme «Game of Thrones», dépasse les 1,9 million. Le service de vidéo à la demande, Netflix, proposée à 8 dollars aux Etats-Unis et 7 euros en Europe, compte déjà 44 millions d’abonnés. Première menace, le départ des amateurs de sports, surtout si BeIN s’empare des droits de la L1 lors de l’appel d’offres de vendredi. La chaîne française, qui a porté plainte pour concurrence déloyale, estime que sa concurrente qatarie vend ses abonnements à perte et lui a déjà fait perdre 187.000 abonnés. En revanche, les fédérations sportives se frottent les mains : grâce à cette nouvelle concurrence, en janvier Canal+ a doublé la mise pour les droits du Top 14 de Rugby jusqu’en 2019. Et la Ligue de football professionnel espère bien voir augmenter fortement les droits lors des enchères vendredi. Mais de la santé de Canal+ dépend celle du cinéma français. L’ARP, qui représente les cinéastes, et l’Union des producteurs de films (UPF) s’inquiètent donc de la concurrence de BeIN. «Si Canal+ est écarté des droits du foot, il pourrait perdre 2 millions d’abonnés. Or ses obligations envers le cinéma sont assises sur son c.a.», a averti mardi dans le «Figaro» Alain Terzian, président de l’UPF. Autre rival en vue pour Canal+, Netflix, qui s’est installé en Europe et pourrait décider à l’automne de lancer une offre en France. «Le scénario catastrophe c’est: les gens se désabonnent massivement de Canal+ pour migrer chez Netflix, installé au Luxembourg, qui ne reverse pas un centime à la création française», a commenté un responsable de l’audiovisuel sous couvert d’anonymat. Certains producteurs voient pourtant des opportunités à l’arrivée de Netflix, qui veut consacrer 400 millions de dollars à son expansion en Europe et pourrait racheter des productions françaises. Canal+ s’est efforcé ces derniers mois d’accélérer la distribution de ses offres, dont CanalPlay, son service de SVOD sans engagement, sur tous les supports, en France et à l’étranger. Il a aussi créé une division Canal OTT («Over the top», indépendante des fournisseurs d’accès) et lancé une chaîne payante au Canada sur Dailymotion, pour 7,99 dollars canadiens par mois sans engagement. Canal+ se dit «très vigilant», face à l’éventualité Netflix. «C’est un épisode concurrentiel important qu’on saura gérer. Mais il faut que la concurrence se fasse à armes égales et pas qu’on parte avec des boulets aux pieds», a commenté Manuel Alduy, directeur de la division OTT.