«Fou» et «préjudiciable»: l’attaque du magnat Rupert Murdoch fin 2020 contre Trump affirmant que la présidentielle lui avait été volée

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Fou» et «préjudiciable»: c’est l’attaque que Rupert Murdoch, magnat de médias conservateurs comme Fox News, avait lancée fin 2020 contre le camp de Donald Trump qui affirmait que la présidentielle américaine lui avait été volée par Joe Biden. Cela fait déjà quelques années que la lune de miel a pris fin entre les trumpistes et la pépite Fox News de l’empire News Corporation du milliardaire australo-américain Rupert Murdoch, très prisé des conservateurs et de la droite aux Etats-Unis. Mais le contenu complet d’une plainte de 2021 pour diffamation contre Fox News, intentée par un fabricant de machines électroniques de vote, Dominion, vient éclairer avec force détails et témoignages une relation Trump/Murdoch qui semble avoir tourné au vinaigre. Selon ce document judiciaire de 192 pages rendu public jeudi soir par la justice de l’Etat du Delaware, Rupert Murdoch, 91 ans aujourd’hui, avait commencé fin 2020 à lancer des piques contre le camp du républicain Trump, dans des messages à des dirigeants de Fox News. Alors même, qu’à l’antenne et en public, les assertions contestant l’élection du démocrate Biden, le 7 novembre 2020, faisaient florès sur les plateaux télé. Dans le privé, des animateurs vedettes de Fox, comme Tucker Carlson et Laura Ingraham, réputés pour leur positionnement conservateur, se moquaient même du président Trump, élu en novembre 2016, mais battu 4 ans plus tard par le démocrate Joe Biden. Ces révélations, dont une partie était connue, sont tirées du dossier de la plainte en diffamation déposée en mars 2021, pour laquelle l’entreprise Dominion réclame 1,6 milliard de dollars de dédommagement. Ce fabricant s’estime diffamé par Fox News qui affirmait que ses machines électroniques de vote avaient servi à fausser les résultats en plusieurs endroits des Etats-Unis et même, par le passé, au Venezuela, en faveur du président décédé Hugo Chavez. Mais lorsque les conseillers de Donald Trump, Rudy Giuliani et Sidney Powell, dénoncèrent devant la presse une prétendue fraude à grande échelle, Murdoch écrivit aussitôt à la patronne de Fox News Media, Suzanne Scott. Dans ce courriel intitulé «En train de regarder Giuliani!», Murdoch qualifie à l’époque l’intervention des trumpistes de «truc vraiment fou. Et dommageable», selon le document judiciaire. Le fondateur de News Corporation écrit encore: «Un truc terrible, préjudiciable à tout le monde, j’en ai peur». Des échanges entre commentateurs de Fox ont aussi été rendus publics: Carlson confie ainsi à Ingraham que leur collègue «Sidney Powell est une menteuse». «Je l’ai prise en flagrant délit, c’est insensé», écrit-il, Ingraham lui répondant que «Sidney est complètement dingue» et que «personne ne travaillera (plus) avec elle». Il faut dire que Fox News avait déclenché l’ire des trumpistes en ayant été le 1er média américain, le soir du 7 novembre 2020, à annoncer la victoire de … Biden dans l’Etat de l’Arizona. Une porte-parole de Fox News a critiqué vendredi dernier Dominion pour avoir «choisi et sorti des citations (de la plainte) de leur contexte». «Dominion va faire beaucoup de bruit et créer de la confusion (…) mais le coeur de l’affaire reste la liberté de la presse et d’expression, des droits fondamentaux conférés par la Constitution», a-t-elle défendu dans un courriel. De fait, les plaintes pour diffamation sont limitées aux Etats-Unis par la sacro-sainte liberté d’expression protégée par le premier amendement de la Constitution des Etats-Unis et les affaires se terminent le plus souvent par un accord à l’amiable.Même si cela risque d’entacher la réputation et les comptes de Fox, l’un des cinq réseaux télévisuels nationaux américains avec CNN, NBC, ABC et CBS.