L’Autorité française de la concurrence somme Google de négocier avec la presse

801

L’Autorité de la concurrence française a ordonné jeudi à Google de négocier «de bonne foi» avec les éditeurs et agences de presse en France sur la rémunération de leurs contenus protégés par les droits voisins, une décision aussitôt saluée par plusieurs médias. Ces mesures conservatoires d’urgence resteront en vigueur jusqu’à la publication par l’Autorité d’une décision au fond. Elles imposent au géant du web un délai de 3 mois pour établir des négociations avec les éditeurs ou agences de presse qui le désirent et proposer «effectivement» une rémunération pour l’affichage des contenus protégés par la nouvelle législation européenne sur les droits voisins. Ces négociations devront de plus couvrir la période de reprise des contenus depuis la date d’entrée en vigueur de la loi, le 24 octobre 2019, a précisé l’Autorité. Elle exige que Google lui adresse un 1er rapport d’étape sous 4 semaines sur la manière dont le groupe se conforme à son injection, puis un nouveau nouveau rapport le 5 de chaque mois. «Ça nous laisse beaucoup de chances d’aboutir. Le moment est venu de discuter et de conclure un accord pour être rémunérés justement», a salué Marc Feuillée, DG du «Figaro». «Nos demandes sont reconnues!», s’est félicité Pierre Louette, PDG du groupe Les Echos-Le Parisien. «L’Autorité vient dire qu’imposer la gratuité revient à contourner la loi… C’était bien le coeur de notre raisonnement!», a-t-il ajouté;  Pour Fabrice Fries, PDG de l’AFP, «ces mesures conservatoires répondent pleinement aux demandes des éditeurs et des agences de presse. Elles étaient attendues par les Etats membres qui doivent transposer la directive et par tout l’écosystème européen de la presse». «Il est maintenant de l’intérêt de toutes les parties de trouver un accord juste et raisonnable», a-t-il déclaré. Google a réagi en assurant qu’il se conformerait à la décision de l’Autorité, tout en continuant de négocier avec les éditeurs. «Nous discutons avec un grand nombre d’éditeurs de presse afin d’accroître notre soutien et nos investissements au profit du secteur de la presse. Nous nous conformerons à la décision de l’Autorité de la concurrence, que nous sommes en train d’analyser, tout en poursuivant ces négociations», a indiqué Richard Gingras, vice-président chargé des actualités chez Google. Après l’adoption il y a un an d’une réforme du droit d’auteur par le Parlement européen ouvrant la voie à une rémunération de la presse par les plateformes du Web, puis sa transcription en droit français, Google avait présenté de nouvelles règles pour se mettre en conformité. Il ne comptait plus afficher d’extraits d’articles et de photos et vidéos réduites (ou «vignettes») dans les résultats de son moteur de recherche ainsi que dans son service Google Actualités, sauf si les éditeurs l’autorisaient à le faire gratuitement. Google argumentait alors qu’il refusait par principe de payer les éditeurs de presse pour leurs contenus, faisant valoir l’énorme trafic qu’il leur apportait en échange. Plusieurs organisations de presse avaient déposé plainte dans la foulée. Menacés d’une sérieuse perte de trafic et donc de revenus, nombre d’entre eux avaient toutefois accepté les conditions de Google. Dans sa décision, l’Autorité de la concurrence souligne le «caractère irremplaçable pour les éditeurs de presse du trafic issu de Google». Elle reproche également au moteur de recherche un traitement indifférencié entre les éditeurs et l’accuse d’un «contournement de la loi» sur les droits voisins, privant celle-ci «d’une grande partie de son effectivité». Le ministère de la Culture a «salué» la décision «sans ambiguïté» de l’Autorité de la concurrence. «Il revient désormais à Google de proposer aux éditeurs une juste rémunération, à la hauteur de la valeur que le moteur de recherche retire des contenus d’information», a ajouté Franck Riester, dans un communiqué.