Sandra Muller, l’initiatrice de #balancetonporc, jugée mercredi pour diffamation

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Près de deux ans après la déferlante #balancetonporc sur les réseaux sociaux, la créatrice de ce mot-clé emblématique, poursuivie à Paris pour diffamation par l’homme qu’elle avait nommément accusé de harcèlement sexuel, connaîtra mercredi son jugement.

Le 13 octobre 2017, Sandra Muller, journaliste pour la «Lettre de l’audiovisuel», tweetait le message suivant: «#balancetonporc !! toi aussi raconte en donnant le nom et les détails un harcèlent (sic) sexuel que tu as connu dans ton boulot. Je vous attends». Message suivi quatre heures plus tard par un second tweet: ««Tu as des gros seins. Tu es mon type de femme. Je vais te faire jouir toute la nuit» Eric Brion ex patron de Equidia #balancetonporc».

La parole de milliers de femmes dénonçant harcèlement ou agressions sexuelles s’était libérée sous ce mot-dièse #balancetonporc, rapidement devenu viral, et sous son équivalent en anglais #Metoo (#MoiAussi) lancé par l’actrice Alyssa Milano. M. Brion, consultant et ancien directeur général de la chaîne de télévision Equidia, avait attaqué Sandra Muller en diffamation.

Lors de l’audience devant la 17e chambre civile du tribunal de Paris, le 29 mai dernier, Mme Muller avait défendu la libération de la parole initiée par #balancetonporc, tandis qu’Eric Brion et ses avocats avaient dénoncé une forme de «délation». Ces propos, retweetés plus de 2.500 fois, remontent à une soirée cannoise de 2012, en marge du Marché international des programmes de télévision où ils se trouvaient tous deux pour le travail. Eric Brion, qui a convenu avoir eu des mots déplacés et s’était excusé par texto le lendemain, s’était défendu d’«être un harceleur sexuel».

Ses avocats avaient attaqué le «mensonge» sur lequel serait basé #balancetonporc, puisqu’Eric Brion «n’est pas un harceleur»: «Oui, #balancetonporc est un phénomène superbe, mais à côté de ça, il y a eu de la calomnie, de la rumeur». Ils réclament 50.000 euros de dommages et intérêts, 15.000 euros de frais de justice, la suppression du tweet divulguant son nom et des publications judiciaires.

En face, les avocats de Sandra Muller avaient estimé que condamner leur cliente reviendrait à «baillonner» la parole libérée. Sur le plan du droit, ils avaient avancé qu’elle ne peut être condamnée pour diffamation puisqu’Eric Brion a reconnu avoir tenu les propos qu’elle lui impute. Ils avaient aussi décrit ces propos comme du «harcèlement» au sens large du terme.

La décision sera mise à la disposition des parties mercredi après-midi. Sandra Muller, l’une des «briseuses de silence» désignées par le magazine Time comme «Personnalités de l’année» 2017, a annoncé la tenue d’une conférence de presse à 15h30 au cabinet de son avocat Francis Szpiner à Paris.