77ème Mostra : des mesures sanitaires draconiennes et 18 films en compétition pour faire oublier, pendant dix jours, la pandémie

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«Nous en avons assez de voir des films en streaming!»: la 77e Mostra de Venise ouvrait mercredi, avec des mesures sanitaires draconiennes et 18 films en compétition pour faire oublier, pendant dix jours, la pandémie. «Nous ne pouvions pas ne pas faire le festival !», a lancé mardi après-midi le directeur du plus ancien des festivals de cinéma, Alberto Barbera, assurant que «toutes les mesures de prudence» avaient été prises. A ses pieds, le tapis rouge a été bordé d’un haut mur gris, bouchant la vue des passants, pour éviter les attroupements. Tous les accès sont surveillés par caméra thermique. Ceux qui ont de la température n’entreront pas. Mais sur le Lido, fin prêt pour recevoir les festivaliers mardi soir, l’essentiel est là: derrière les murs de l’imposant Palais du Cinéma, les salles obscures sont prêtes pour le premier grand festival international de cinéma d’un monde bouleversé par la pandémie. Pour le directeur de la Mostra, il y avait urgence : «nous en avons assez de voir les films en streaming ! L’expérience du film en salle nous manque. Et il est temps de redémarrer». Mercredi en début de soirée, il accueillera les directeurs des plus grands festivals d’Europe, dont Cannes et Berlin, d’ordinaire en concurrence pour attirer les meilleurs films. Ils ont prévu d’assister à la soirée d’ouverture sur le Lido pour marquer leur «solidarité envers l’industrie cinématographique mondiale». Cette dernière, en plein marasme après des mois de fermeture de salles ou d’arrêt de tournages autour de la planète, peut espérer retrouver un peu d’espoir dans la tenue de la Mostra, moins de six mois après l’annulation du festival de Cannes. Puis ce sera enfin l’heure des cinéphiles : un film italien hors compétition, «Lacci» de Daniele Luchetti, l’histoire d’une famille napolitaine sur 30 ans ponctuée d’amours, de trahisons et rancoeurs, a l’honneur d’inaugurer les projections, dans des salles où un siège sur deux est condamné et où le port du masque est de rigueur. Le jury, lui, se mettra au travail le lendemain. Présidé pour la deuxième année consécutive par une femme, l’Australienne Cate Blanchett, il distinguera le récipiendaire du prestigieux Lion d’or du meilleur film, parmi des productions venues aussi bien d’Italie, d’Inde que de Pologne, dont 8 sur 18 sont réalisés par des femmes. M. Barbera a d’ailleurs mis l’accent sur «la composante féminine, jusqu’ici cantonnée à des pourcentages embarrassants», espérant certainement mettre fin aux polémiques qui ont émaillé les précédentes éditions. Le sujet reste brûlant pour le monde du cinéma, trois ans après la vague #MeToo. Aux côtés de Cate Blanchett siègent notamment l’acteur américain Matt Dillon, le réalisateur allemand Christian Petzold, ou encore la comédienne française Ludivine Sagnier, pour désigner le successeur de «Joker» de Todd Phillips, couronné l’an dernier avant de remporter cinq mois plus tard deux Oscars. Des cinéastes confirmés sont de la compétition, comme l’Israélien Amos Gitaï avec «Laila in Haifa» ou le Japonais Kiyoshi Kurozawa («Les amants sacrifiés»). La France est représentée par un seul film, le drame «Amants» de Nicole Garcia. Quelle que soit l’issue de la compétition, cette édition de la Mostra, maintenue contre vents et marées, ne sera pas comme les autres. La voilure a été réduite et les films américains, notamment, se sont faits très rares, contrairement à l’habitude prise ces dernières années de présenter à Venise de grosses productions en espérant les mettre en orbite pour la course aux Oscars.