Canal+ : leader sur le sport mais concurrencé par beIn

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En 30 ans, Canal+ a transformé le paysage sportif français, mais doit désormais composer avec la  concurrence de la chaîne beIN Sports,filiale du groupe qatari Al-Jazeera,qui se verrait bien calife à la place ducalife. «Il y un avant et un après Canal+pour le sport français», explique Vincent Rousselet-Blanc, spécialiste médias et auteur du blog «En pleine lucarne». «C’est grâce à Canal+ que le foot, mais plus encore le rugby, ont été médiatisés». «L’idée à l’origine n’était pas que le sport prenne cette importance. Avant le lancement, on avait plutôt insisté sur l’info», se rappelle Charles Biétry, directeur desSports de Canal de sa création en 1984à 1998. «On était surtout préoccupé desavoir si on allait survivre. Et puis, à 10 minutes de la fin de notre premier match, Nantes-Monaco (9 novembre1984), le président André Rousselet m’a appelé: «On tient quelque chose d’extraordinaire avec le foot». On s’est rendu compte que le sport était une carte à jouer pour les abonnements»,se souvient-il. «Il fallait montrer du sport, d’une manière différente,pour que les gens qui paient soient convaincus qu’ils aient quelque chose en plus», note Biétry

L’argentier du foot : Boxe, football américain, NBA, Première division française, de jour, de nuit, le sport prend toute sa place dans la grille,aidé par une réalisation novatrice.Multiplication des angles de vue,travail sur le son, présence dans lesvestiaires: Canal innovera au gréde ses acquisitions de droits TV(championnats étrangers, Coupesd’Europe). Omniprésente, la chaîne,devenue groupe surpuissant, vase transformer en grand argentierdu sport français. Elle débourse aujourd’hui 700 M euros par an, le double d’il y a 10 ans, pour rester propriétaire des droits des plus grands matches de foot. «C’est presque un cercle vicieux. Aujourd’hui, Canal finance la Ligue 1 à hauteur de 540M par saison (contre plus de 150 Mpour BeIn Sports, son concurrent).Sans Canal, le foot s’effondre»,avance Vincent Rousselet-Blanc.Canal a même été jusqu’à prendre le contrôle du Paris SG pendant 15ans (1991-2006). «La relation entre les sports et Canal+ est une relation vertueuse dans les deux sens», assureCyril Linette, directeur des Sportsde Canal+. «Le sport a énormément fait pour la notoriété et le business de Canal, et à travers ses innovations,ses investissements, Canal a fait beaucoup de bien au sport».

Chéquier illimité : Depuis deux ans, l’irruption de BeIN Sports(groupeAl-Jazeera) a changé la donne.Comme Canal en son temps, le groupe qatari se montre offensif sur de nombreux droits. Plus symboliquement, le président d’Al-Jazeera Sports (Nasser Al-Khelaïfi)est aussi devenu celui du Paris SG.Mais les similitudes s’arrêtent là.«On ne peut pas comparer ce qu’a fait Canal et ce que fait BeIN»,tempère Vincent Rousselet-Blanc.«Les sommes en jeu ne sont plus lesmêmes. Canal a mis 30 ans à avoir 5 millions d’abonnés (+ 5 millions sur CanalSat), alors que BeIN, avec son chéquier illimité, en a conquis 2,5 millions en seulement deux ans»,rappelle-t-il. Depuis 2012, les deux géants sont en bataille à peu près surtous les sports, à l’image des droits du Top 14 de rugby pour la période 2014-2019, accordés à Canal dans un premier temps puis retoqués par la justice après une action de BeIN.«Canal n’est plus seul, nous sommes dans un contexte concurrentiel. BeIN  des moyens colossaux qui nous obligent à faire de vrais choix»,explique Cyril Linette.