Concurrence: Paris, Berlin, Rome et Varsovie pressent Bruxelles à la réforme

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Paris, Berlin, Rome et Varsovie ont pressé Bruxelles de réformer le droit européen de la concurrence, afin de faire face aux entreprises chinoises et aux géants américains du numérique. Dans une lettre adressée à la vice-présidente de la Commission européenne, Margrethe Vestager, les ministres de l’Economie de la France, l’Allemagne, l’Italie et la Pologne la pressent d’adopter «un plan de travail dans les prochaines semaines». Une porte-parole de la Commission, Arianna Podesta, a déclaré que «toutes les contributions seront prises en compte dans le débat en cours». En décembre, la Danoise, en charge de la concurrence et de l’économie numérique, avait promis d’actualiser les règles européennes de la concurrence afin de tenir compte «des changements engendrés par la mondialisation et la numérisation». Mais depuis, elle tarde à donner son calendrier, provoquant l’impatience de Paris et Berlin, très critiques depuis l’interdiction l’an passé par Bruxelles de la fusion des groupes allemand Siemens et français Alstom, qui devait engendrer un géant européen du rail pour contrer la concurrence chinoise. Le 15 janvier, Mme Vestager avait déclaré «avoir appris à ne jamais donner de date car sinon tout le monde se concentre sur le respect du calendrier et pas sur la qualité du travail». Jeudi, Mme Podesta n’a pas donné davantage de précision sur le calendrier. «La nature de la concurrence a changé», soulignent le Français Bruno Le Maire et l’Allemand Peter Altmaier, auxquels se sont désormais joints la Polonaise Jadwiga Emilewicz et le ministre italien du Développement économique Stefano Patuanelli. «Les compagnies européennes doivent maintenant faire face à des compagnies étrangères qui parfois bénéficient d’aides d’Etat substantielles et de marchés domestiques protégés, parfois à un degré très élevé», écrivent-ils, sans nommer directement la Chine. Ils «appellent» la Commission à «proposer une version révisée du contrôle des concentrations», l’objectif étant de faciliter des fusions entre grands groupes européens pour constituer des géants dignes de ce nom sur le plan mondial. Ils veulent également des «lignes directrices pour la création de coentreprises européennes» qui permettraient aux firmes de l’UE, et notamment les petites et moyennes entreprises ainsi qu’aux start-ups, d’avoir une idée plus claire de ce qui peut être autorisé ou pas. Pour faire face à de «gros acteurs de l’économie numérique», les 4 ministres appellent à recourir «à davantage de mesures conservatoires». Ces mesures, très utilisées par l’Autorité de la concurrence en France mais quasiment jamais dans l’UE, permettent d’agir en cas d’urgence sans se prononcer sur le fond du dossier, en imposant certains comportements à une grosse entreprise dont les pratiques anticoncurrentielles sont telles qu’elles nuisent gravement et de façon irrémédiable à ses rivaux.