Depuis que le président de la République a annoncé hier l’idée de supprimer la publicité sur les chaînes publiques, les réactions ne cessent d’affluer. L’Union syndicale de la production audiovisuelle (USPA) demande «un vrai débat national». Rencontre avec Jacques Peskine directeur général du syndicat :
média + : Que pensez-vous de la déclaration faite par le président Nicolas Sarkozy quant à la suppression de la publicité sur les chaînes publiques ?
Jacques Peskine : Je pense que c’est un énorme élargissement du chantier de l’audiovisuel que le président de la République avait déjà ouvert en août dernier dans sa lettre à la ministre de la culture (ndlr : Christine Albanel) et que cet élargissement va nous obliger à poser énormément de questions sur la table.
média + : Cet élargissement vous paraît-il positif ou est-ce la source de plusieurs craintes ?
Jacques Peskine : Les deux. Ce schéma peut être positif s’il conduit vraiment à une promotion du service public, notamment à un maintien de son périmètre et à une amélioration de son financement. C’est le bon côté de la médaille. La France a une télévision beaucoup moins bien financée que des pays comparables; l’idée de créer à la fois de nouvelles ressources publiques et des ressources commerciales est une très bonne idée. Seulement, pour cela, il faut beaucoup d’argent supplémentaire, ce qui suppose que le prélèvement sur les opérateurs de télécommunication soit considérable. Cela se joue sur plusieurs centaines de millions d’euros. Si cela n’est pas possible, alors les risques seraient considérables car cela conduirait à un rétrécissement du service public, auquel évidemment, nous sommes opposés. Dans les pays de l’Union Européenne, le service public joue un rôle primordial dans le développement de l’audiovisuel: il forge et dirige son identité. Sa perdition serait dramatique culturellement et économiquement.
média + : D’où l’idée de demander un débat national…
Jacques Peskine : Une des modalités serait de préparer, ce que les Anglais appellent, un livret vert qui énoncerait des thèmes (financement, concurrence entre chaînes) sur lesquels on discuterait sur plusieurs jours. A terme, on arriverait à une série de propositions cohérentes sur l’ensemble de la filiale.
média + : Qui dit débat… dit idées, quelles sont vos propositions ?
Jacques Peskine : On est favorable à l’idée que les services publics soient financés aussi par une taxe sur les nouveaux opérateurs. C’est une idée que l’on avait déjà mise en avant il y a quatre ans. Pour nous, cet outil serait un relais à la redevance qui ne joue plus son rôle d’accroissement de financement des chaînes publiques. Il faut accroître le financement public. D’une part, nous ne sommes pas du tout favorables à la réduction de l’ambition et de la place du service public; on tient à ce que les chaînes publiques actuelles (France 2, France 3, France 5…) gardent chacune leur identité et restent dans le paysage public. D’autre part, la France a pris un retard considérable, par rapport à l’Allemagne et l’Angleterre, quant au différentiel de financement entre la télévision publique et la télévision privée. Le simple fait de modifier le système de ressource de la télévision publique ne dispense pas de l’accroissement de ces financements. La proposition du président de la République est plus difficile car il est compliqué d’augmenter les ressources quand, en plus, il faut en changer.