J.J. CAMPANELLA (Producteur TV) : « Les scénarios de fiction sont aujourd’hui bien meilleurs à la télévision qu’au cinéma »

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Juan José CAMPANELLA, Scénariste, Réalisateur et ProducteurTV

Scénariste, Réalisateur et Producteur de télévision, Juan José CAMPANELLA qui a travaillé sur de nombreuses séries TV telles que «New York Unité Spéciale», actuellement en diffusion, ou plus récemment «Colony», nous décrypte l’évolution du secteur. Entretien.

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Pour avoir assuré la réalisation de séries comme «New York Unité Spéciale» ou encore «Dr House» par le passé, de quelle liberté artistique disposiez-vous sur de telles franchises ?

Juan José CAMPANELLA

Tout dépend si vous êtes ou non le réalisateur qui assure le pilote de la série. Dans ce cas, vous décidez non seulement du style visuel mais aussi de l’empreinte artistique du show. Si vous débarquez en cours de saison, la production vous donne évidemment accès à la bible du programme. Prenons un exemple, dans «Dr House», les plans de caméras à la main n’étaient pas du tout utilisés sur le show. Mais comme ma volonté a été d’en mettre, il a fallu que je justifie ce choix auprès du créateur. La demande est remontée jusqu’à la chaîne et j’ai ensuite reçu un feu vert.

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Il faut donc batailler pour imposer ses choix ?

Juan José CAMPANELLA

Dans la plupart des séries américaines, les scénaristes, acteurs et directeurs de la photographie sont les mêmes sur une saison entière. Il y a donc un sens de l’unité. En revanche, il y a un roulement important avec les réalisateurs. De ce fait, en fonction des épisodes, le point de vue change. Réaliser une série, c’est un peu comme jouer aux échecs avec une horloge. Il faut faire les bons mouvements, remporter la partie avec un temps alloué. Il faut donc penser rapidement et avoir le rendu le plus cinématographique possible.

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Comment évolue concrètement le secteur mondial de la série TV ?

Juan José CAMPANELLA

A l’échelle internationale, les séries télévisées s’orientent vers des problématiques de plus en plus sociétales. C’est très marquant. La grande majorité des programmes que j’ai pu visionner ces derniers mois traitent de questions de fond et poussent à réfléchir. Paradoxalement, aux Etats-Unis, la dimension «entertainment» reste l’épine dorsale des séries TV. A cet effet, les sujets d’actualité y sont très peu abordés. Il suffit de constater la teneur des séries policières, de science-fiction ou même des comédies. Dans le reste du monde, il est très intéressant de voir à quel point des thématiques deviennent récurrentes : traitement du terrorisme, du changement de culture, de l’aspect économique.

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Comment avez-vous fonctionné sur la série «Colony» (diffusée sur TF1) dont vous êtes à la fois producteur et réalisateur ?

Juan José CAMPANELLA

J’ai conçu la bible et assuré la mise en scène. Pour «Colony», j’ai décidé qu’il fallait la tourner comme un documentaire. Notre référence, c’était la guerre d’Algérie. Côté réalisation, nous n’avions pas de plan de grue ou de longs plans.

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Quel tournant constatez-vous sur les nouvelles séries US qui débarquent sur le marché ?

Juan José CAMPANELLA

La plupart des networks américains conçoivent la télévision comme du pur divertissement, et non pas comme un miroir de la réalité. Or, dans le reste du monde, c’est ce reflet de la société qui est le plus perceptible dans les séries. L’évasion passe au second plan.  Les séries américaines tentent d’avoir un aspect de plus en plus cinématographique. De mon point de vue, les scénarios sont meilleurs aujourd’hui à la télévision qu’au cinéma.