Philippe Gildas, l’un des premiers à mélanger journalisme et divertissement en France

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Homme de radio et de télévision, Philippe Gildas, qui est décédé dans la nuit de samedi à dimanche, a été l’un des premiers à mélanger journalisme et divertissement en France, notamment aux commandes de l’émission phare de Canal+ «Nulle Part Ailleurs». Le «petit» (1m65) Philippe Leprêtre est né le 12 novembre 1935 à Auray dans le Morbihan. Ce fils de notaire, aîné d’une fratrie de sept garçons, gardera de son enfance une mentalité de chef d’équipe qui marquera toute sa vie professionnelle. A la fin des années 50, étudiant en lettres classiques à la Sorbonne, il comprend qu’il n’est pas fait pour le professorat et s’oriente vers le journalisme sur les conseils de Jean Yanne, Breton comme lui. Il entre comme secrétaire de rédaction au journal «Combat», puis à «Radio Luxembourg», l’ancêtre de RTL.Encore sous les drapeaux, il doit choisir dans l’urgence un pseudonyme un soir où il prend l’antenne pour boucher un trou. Ce sera «Gildas», le prénom de son fils aîné. Il y crée la matinale, cette tranche d’informations qui doit accompagner l’auditeur de son réveil à son travail, dont il sera un des piliers, à RTL puis Europe 1. En 1969, il suit à l’ORTF Pierre Desgraupes pour monter la rédaction de la 1ère chaîne. Il y présente le journal télévisé, «grand-messe» dont il contribue à fixer les règles en tant que rédacteur en chef. Il passe par France Inter puis intègre Europe 1, où ce père de trois fils rencontre sa seconde épouse, l’animatrice Maryse. Le journaliste garde aussi un pied à la télévision. Sur proposition de Pierre Bellemare, il devient animateur de jeux et présente «La tête et les jambes» puis «La chasse au trésor». Devenu directeur d’antenne de la station en 1983, il crée le Top 50, première mesure des ventes de disques en France. En 1985, Pierre Lescure, patron de Canal+, l’invite à le rejoindre dans l’aventure de la première chaîne privée de France qui vient de naître. Les deux hommes vont y concrétiser une idée qui trotte dans leur tête depuis 20 ans : faire un talk-show qui mélangerait journalisme et divertissement. La formule, qui a fait florès depuis, est inédite à la télévision française. Philippe Gildas teste d’abord le concept en milieu de journée avec «Direct», avant de s’installer, deux ans plus tard, en face des JT de 20H00. Pour inciter les téléspectateurs à s’abonner, la seule contrainte de l’émission diffusée en clair est de tenir la promesse de la chaîne cryptée en y montrant ce qu’on ne trouve… «Nulle part ailleurs».Alain Decaux peut y disserter sur les pétomanes pour introduire un sketch des Nuls, le professeur Cabrol, célèbre chirurgien du coeur, y partager sa passion de l’opéra avec le leader de la CGT Henri Krasucki. Outre Les Nuls, l’émission fait émerger Jérôme Bonaldi et ses gadgets, Philippe Vandel, Karl Zéro et bien sûr Antoine de Caunes, jusque là cantonné aux émissions musicales. Philippe Gildas excelle dans son rôle de Monsieur Loyal. Les «Guignols» peuvent se moquer de son brushing et de son expression «Formidable!», José Garcia l’asperger d’eau et de mousse… jamais «Philou» ne perd son flegme, ni son sourire. Pendant 10 ans, «NPA» dicte les modes et les nouvelles règles de l’humour à la télévision. En parallèle, Philippe Gildas crée la société de production Ellipse, qui produit notamment le jeu «Pyramide» et la série d’animation «Les Aventures de Tintin». En 1997, il cède son fauteuil de présentateur de «Nulle Part Ailleurs» à Guillaume Durand et anime d’autres émissions pour Canal+. Après avoir pris, un temps, les rênes d’i-TELE, il lance en 2007 la chaîne Vivolta, dédiée aux seniors. Grand collectionneur de guides de voyage et bavard impénitent, Philippe Gildas affichait un regret : ne pas avoir été reporter.