Pour l’animateur star de Disney, Éric Goldberg, l’animation traditionnelle et la 3D n’ont «pas à être en compétition»

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Du génie d’»Aladdin» à «mini Maui» dans «Vaiana», Éric Goldberg met depuis plus de 30 ans son crayon au service de Disney. Pour cet artiste, l’animation traditionnelle qui est son domaine et la 3D n’ont toutefois «pas à être en compétition». «La 3D et la 2D, ce ne sont pas les Sharks et les Jets», résume le créateur de 68 ans lors du festival d’Annecy, en référence aux deux clans rivaux de «West Side Story». A l’occasion de son centième anniversaire, le studio aux grandes oreilles a dévoilé dimanche un court-métrage rendant hommage à ses personnages phares. Le génie d’«Aladdin» étant de la partie, Éric Goldberg a été sollicité.Mercredi, il livre une leçon de cinéma en plongeant dans des scènes d’«Aladdin» et d’»Hercule», où on lui doit le personnage de Phil, et en montrant comment l’animation traditionnelle peut s’appliquer aux techniques plus récentes. Depuis son dernier long-métrage dessiné à la main, «La princesse et la grenouille» en 2009, Disney ne sort que des films en image de synthèse, aidé par le rachat du pionnier du secteur, Pixar, en 2006. Pas de quoi mettre Éric Goldberg au chômage: il a animé «mini Maui», un tatouage vivant et sorte de conscience de Maui dans le film en 3D «Vaiana» (2016).  «Mini Maui ne parle pas mais on sait toujours ce qu’il pense, c’est un des pouvoirs de l’animation», fait valoir Éric Goldberg au sujet de son «Jiminy Cricket». Pour «Vaiana», les «animateurs de dessins à la main» ont travaillé «bras dessus, bras dessous avec les animateurs numériques. Il fallait que nous fassions nos scènes ensemble, c’était super. On avait l’impression, pour la première fois depuis des années, que tout le studio faisait le même film». C’est en 1992 qu’Éric Goldberg, longtemps producteur de publicités pour la télévision, a rejoint Disney pour «Aladdin». «C’était absolument merveilleux et cela était en grande partie lié à Robin Williams». Le comédien, décédé en 2014, n’a pas seulement prêté sa voix au personnage bleu qui exauce des souhaits dans la version anglaise, ses sketches ont aussi inspiré tous ses gags et métamorphoses. «C’était comme manger trop de bonbons. C’était toujours drôle, nous éclations de rire tout le temps», relate le dessinateur au rire franc sous sa moustache, vêtu d’une chemise ornée de personnages de la bande à Mickey conçue par son épouse Susan, également animatrice chez Disney. L’expérience fut «très différente» pour «Pocahontas» (1995), entièrement co-réalisé avec Mike Gabriel. Déjà parce que le film suivait des personnes ayant réellement existé. Aussi parce que Disney voulait que ce long-métrage «gagne l’Oscar» du meilleur film qui avait échappé à «La belle et la bête», en 1992, au profit du «Silence des Agneaux». Interrogé sur le carton en 2009 d’«Avatar» de James Cameron, Éric Goldberg se montre plus moqueur. «En me croisant dans un couloir au studio, (le compositeur fétiche de Disney) Alan Menken m’a demandé: «Tu as vu Avatar ?». J’ai répondu: tu veux dire Pocahontas avec des Schtroumpfs ? On pouvait prédire toutes les répliques avec ma femme, c’est très similaire», même si «j’aurais aimé que Pocahontas rapporte autant d’argent», plaisante-t-il. Si Éric Goldberg ne se prononce pas sur un éventuel retour de films Disney en 2D au cinéma, il souligne que la directrice créative des studios d’animation depuis 2018, Jennifer Lee, y a «beaucoup encouragé le dessin à la main. C’est un soulagement parce que les directions précédentes ne s’en souciaient pas autant». C’est elle qui lui a ainsi permis de créer trois courts-métrages en 2D, «Comment rester à la maison avec Dingo», pendant la pandémie, lui octroyant «le feu vert le plus rapide» de sa carrière.