Santé: hôpitaux et instituts publics s’attaquent à la désinformation médicale en allant à la rencontre du public

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Spots publicitaires sur les plateformes télé, courtes vidéos sur YouTube («shorts»): les institutions et établissements de santé s’attaquent à la désinformation médicale en allant à la rencontre du public sur les réseaux les plus populaires, avec des approches pédagogiques, souvent humoristiques. Tout au long du mois de novembre, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) va diffuser sur les plateformes de TF1, FranceTV et du groupe M6 de faux spots publicitaires, pour des canettes «Bye bye depress, le jus pour retrouver le moral», une fiole rose «Maigrizer, perte de poids garantie» et une crème contre l’arthrose («Pour des articulations bien huilées»). Le message, à la fin du spot, est lapidaire: «Désolé, les produits miracles n’existent pas». «On a voulu traiter la question de tous ces faux produits, ces fausses solutions miracles, au mieux anodins mais inutiles, au pire vraiment dangereux», indique-t-on à l’Inserm. Avant même la pandémie de Covid, l’Inserm a été pionnier en matière de lutte contre la désinformation en santé, répondant «aux rumeurs, aux questions les plus courantes, voire aux théories complotistes», avec sa chaîne Canal Detox: «Le chocolat est-il bon pour la santé?» (pas spécialement), «Y a-t-il une «épidémie d’autisme+?» (non) «La «cohérence cardiaque»est-elle une technique efficace?» (cette technique respiratoire peut apaiser mais attention à ne pas en exagérer les bienfaits). «En tant qu’organisme public, pour être utile il faut aller là où sont les gens, au coeur de leur vie quotidienne. Et donc, sur les réseaux sociaux notamment», continue l’Inserm. C’est aussi l’intention de l’Institut national du cancer (Inca), avec sa page dédiée sur son site web, «Les éclairages», qui s’interroge sur le rôle des soutien-gorges dans le cancer du sein (aucun rôle) ou sur l’intérêt du jeûne pour les patients cancéreux (attention danger). «Le terreau des fausses informations, c’est un besoin de réponses simples à des questions compliquées», que les internautes ne trouvaient pas forcément sur le site pourtant très riche en information scientifique de l’Institut, explique Emmanuel Collin, son directeur de la communication. Des hôpitaux comme le CHU de Lille se sont aussi mis à la vérification d’informations. Un besoin né au tout début de la pandémie de Covid, explique Audrey Stanek, à la communication de l’hôpital: «En 2020, on a eu des remontées de notre centre antipoison sur une surconsommation de vitamine D pour lutter contre le virus. On a aussitôt mis en garde contre ce faux remède sur nos réseaux sociaux». Depuis, l’hôpital, confronté à des refus de soins ou de vaccination par des patients mal informés, a produit des dizaines de vidéos sur sa chaîne YouTube. «On interroge nos professionnels de santé en leur soumettant les pires infox, pour les faire réagir humainement puis scientifiquement», détaille Audrey Stanek. Le CHU de Lille a signé il y a un an un partenariat avec YouTube pour produire des vidéos de vulgarisation médicale sur les maladies les plus fréquemment mentionnées dans les recherches de la plateforme web. Les contenus certifiés comme ceux du CHU sont mis en avant dans les résultats obtenus par les utilisateurs. A l’AP-HP (assistance publique-hôpitaux de Paris), également partenaire de YouTube, Charlotte Guyon, cheffe de projet sur l’offre de soins, constate: «Les patients et le public ont pris l’habitude de s’informer sur les réseaux sociaux et notamment YouTube, ça fait partie maintenant d’un prolongement de la prise en charge et de l’accompagnement». Aller sur YouTube, c’est aussi une manière de «mettre à profit l’expertise de nos professionnels et valoriser leurs savoirs», insiste Charlotte Guyon.