Cannes 2023 : un collectif d’actrices et d’acteurs fustige le Festival qui déroule «le tapis rouge» pour Depp et Maïwenn

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«La honte»: un collectif d’actrices et d’acteurs, dont Julie Gayet et Laure Calamy, critiquait ce mardi 16 mai 2023 le Festival de Cannes, qui déroule «le tapis rouge aux hommes et femmes qui agressent», en référence à Johnny Depp et à la réalisatrice Maïwenn. Dans une tribune publiée par le quotidien «Libération», ce collectif apporte également son soutien à l’actrice Adèle Haenel, qui avait officialisé il y a une semaine son arrêt du cinéma pour dénoncer une «complaisance» du 7ème art vis-à-vis des agresseurs sexuels.

«Nous sommes profondément indigné·e·s et refusons de garder le silence face aux positionnements politiques affichés par le Festival de Cannes», explique cette tribune de «Libération». «En déroulant le tapis rouge aux hommes et aux femmes qui agressent, le festival envoie le message que dans notre pays nous pouvons continuer d’exercer des violences en toute impunité, que la violence est acceptable dans les lieux de création», ajoute le texte. Les signataires soulignent que «le cinéma français a intégré un système dysfonctionnel qui broie et anéantit», un «système basé sur les principes de domination et de silenciation». «Lorsque nous avons le courage de parler ou demander de l’aide, nous nous entendons trop souvent dire: «Tais-toi s’il te plaît, pour la vie du film». Il arrive même que des producteur·ices soient prêt·es à acheter notre silence», dénoncent-ils encore. Soutenant la décision d’Adèle Haenel, qui avait fait une sortie fracassante lors de la cérémonie des César il y a trois ans pour s’opposer au sacre de Roman Polanski, rattrapé par des accusations anciennes de viol, les signataires déplorent «le fait que ce milieu soit toxique au point de vouloir le quitter totalement». «Nous profitons de cette tribune pour dire avec elle: «LA HONTE»».

Parmi les signataires figurent la comédienne Ophélie Bau, une des stars du sulfureux «Mektoub, My Love: Intermezzo» d’Abdellatif Kechiche, estimant que son contrat n’avait pas été respecté concernant l’utilisation d’une scène de sexe oral non simulée entre elle et Roméo de Lacour. La 76ème édition du plus grand festival de cinéma au monde est marquée par le retour de Johnny Depp dans le film d’ouverture «Jeanne du Barry», après qu’il a été écarté des plateaux de Hollywood ces dernières années à la suite des accusations de violences conjugales de son ex-compagne Amber Heard. La réalisatrice du film, Maïwenn, fait elle-même face à une plainte judiciaire, après avoir récemment agressé le patron de Mediapart, Edwy Plenel, dans un restaurant.

De son côté, la CGT a critiqué le choix du Festival de sélectionner le film de Catherine Corsini, «Le retour», après des soupçons de harcèlement et d’irrégularités concernant une scène explicitement sexuelle mais simulée, impliquant une actrice de moins de 16 ans. Faire ce choix montre que «les violences morales, sexistes et sexuelles ne sont pas un sujet pour le Festival de Cannes. Celles ou ceux qui les dénoncent n’ont pas voix au chapitre de la sacro-sainte création», insiste un communiqué. La CGT a apporté son soutien aux techniciens et comédiens qui ont «osé faire part à la production des conditions de tournage» et de «comportements inacceptables de (la) réalisatrice», saluant leur «courage malgré les intimidations».