Les milliardaires qui bousculent l’univers des médias

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L’univers des médias, c’est la tectonique des plaques: opposés dans certains projets, alliés dans d’autres, quelques gros investisseurs sont en train de remodeler le paysage.

Ceux qui s’agitent:

– Daniel Kretinsky : Le magnat tchèque a accéléré ses investissements dans les médias français. En décembre, son groupe de presse CMI France est entré au capital du studio de podcast Louie Media. Trois mois auparavant, Kretinsky avait renfloué le quotidien «Libération» à hauteur de 15 millions d’euros sans pour autant en devenir actionnaire. En octobre 2021, CMI France a lancé l’hebdomadaire «Franc Tireur», après avoir racheté depuis 2018 les magazines du groupe Lagardère Active (dont «Elle» et «Télé 7 jours»), l’hebdo «Marianne», des parts dans «Le Monde» et plus de 5% du groupe TF1. Par ailleurs, Kretinsky s’est allié à Stéphane Courbit (la société de production Banijay) et à l’investisseur Pierre-Edouard Stérin pour tenter de reprendre la maison d’édition Editis.

– Vincent Bolloré : Le milliardaire dirige un empire avec son groupe Vivendi: il contrôle la chaîne Canal+ et ses petites soeurs (C8 et CNews) ainsi que les magazines du groupe Prisma («Voici», «Capital», …). Il est aussi en train d’avaler Lagardère (Europe 1, «Paris Match», …), dont il détient désormais 57% du capital. La finalisation de cette prise de contrôle est toutefois conditionnée au feu vert des autorités européennes de la concurrence, qui l’examinent jusqu’au 23 mai. .

– Xavier Niel: Celui qui a chamboulé les télécoms avec l’opérateur Free a tenté de faire de même avec la télé en postulant à la reprise de la fréquence de M6. Malgré l’échec de cette candidature en février, Niel reste très présent dans les médias: il est actionnaire des groupes Le Monde («Le Monde», «Télérama»…), Nice-Matin, France-Antilles ou de Paris-Turf. Il a aussi financé la création cet automne du média économique d’investigation en ligne «L’Informé».

– Rodolphe Saadé: PDG de l’armateur CMA-CGM, il a fait une entrée remarquée dans le monde des médias. Après une bataille judiciaire contre Xavier Niel, CMA-CGM est devenu en octobre propriétaire du groupe La Provence («La Provence» et «Corse Matin»). Puis il s’est invité fin 2022 au capital de M6, dont il possède quelque 8%. Signe qu’il pourrait ne pas s’arrêter là, Saadé vient de recruter Laurent Guimier, ex-directeur de l’information de France Télévisions, pour diriger la branche médias de CMA-CGM.

Ceux qui frémissent:

– Stéphane Courbit: Son groupe Banijay est un mastodonte de la production télé, avec une centaine de sociétés dans le monde et de nombreuses émissions et séries à succès («Koh-Lanta», «Peaky Blinders»…). Avant l’alliance avec Kretinsky et Stérin pour Editis, Courbit s’était associé à Rodolphe Saadé pour racheter M6 à l’Allemand Bertelsmann, qui a finalement renoncé à vendre début octobre.

– Pierre-Edouard Stérin: Ce catholique et libéral revendiqué a bâti son succès sur la société Smartbox (coffrets cadeaux), avant d’investir dans le site de réservation de restaurants La Fourchette puis de fonder en 2009 la société d’investissements Otium Capital. Fin 2021, Stérin a créé un «Fonds du Bien commun», qu’il s’est engagé à alimenter avec sa fortune personnelle pour financer des projets philanthropiques.

– Charles d’Anjou: Cet homme d’affaires russophile finance le média Omerta, créé en ligne fin 2022 et qui se décline en version papier trimestrielle depuis fin février.

Ceux qui ne bougent pas (encore):

Chez d’autres gros acteurs, c’est pour l’instant statu quo. C’est le cas de Patrick Drahi et son groupe Altice (BFMTV, RMC…), de Bernard Arnault, PDG du géant du luxe LVMH (qui contrôle «Les Echos», «Le Parisien et Radio Classique), de Dassault («Le Figaro»), de François Pinault («Le Point») ou de Bouygues (TF1, dont le projet de fusion avec M6 a échoué en septembre).