Investir sur des «talents», le pari des nouvelles plateformes de trading

254

Investir sur le rugbyman Antoine Dupont ou l’influenceur Mohamed Henni au lieu de miser sur des cryptomonnaies ou des actions de multinationales? C’est le pari de nouvelles plateformes de trading spécialisées dans les «talents», pour qui l’humanité peut «aussi» être cotée en bourse. «Je n’ai jamais compris le fait qu’on puisse investir sur des sociétés mais pas sur des individus», déclare Christophe Vattier, co-fondateur de la plateforme de trading en ligne Royaltiz, qui compte aujourd’hui 160 talents en tous genres «cotés» sur sa Bourse, des plus célèbres, comme Antoine Dupont ou le rappeur Fianso, à des profils émergents. Fondée en 2021, cette start-up française, qui a réalisé 4,2 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2022, entend faire de l’être humain «une nouvelle classe d’actif financier» et ainsi devenir une «bourse de l’humanité», selon son dirigeant. Comment ça marche ? Une fois introduits sur un marché virtuel, ces «talents» voient leur cote fluctuer en fonction de leur notoriété et de leurs accomplissements professionnels (performances sportives ou artistiques mais aussi nombre de followers, nombre de likes, nombre de vues…). Les investisseurs peuvent miser sur les «talents» qu’ils estiment prometteurs en achetant l’équivalent d’actions, qui peuvent ensuite être revendues au moment qu’ils estiment opportun. Les gains issus de la revente de ces actions d’un nouveau genre peuvent être retirés vers un compte bancaire ou réinvestis dans de nouveaux «talents», augmentant ainsi la participation des fans dans la carrière des futures pépites internationales. »Le fait que des gens investissent de l’argent sur moi me motive encore plus parce que ma valeur est directement liée à mes résultats sportifs», confie Hadrien David, pilote automobile de 19 ans coté chez Royaltiz. «Et ça me montre qu’il y a des gens qui croient en moi, c’est un peu une nouvelle manière de soutenir un athlète», ajoute-t-il. Même ambition pour Trendex, start-up franco-américaine lancée à la fin de l’année 2021 et soutenue par Y Combinator, le célèbre accélérateur de start-up de la Silicon Valley, ou encore le Ballon d’Or Karim Benzema, ambassadeur et investisseur de l’entreprise. «On se voit plus comme un service pour les «talents», on leur permet d’être rémunérés par le simple fait d’exister et de bien performer», explique Andrea Bonapersona, co-fondateur de Trendex, qui garantit en moyenne une répartition des revenus à hauteur de 70% pour la plateforme et 30% pour les «talents». La plateforme revendique «plus de 30.000 utilisateurs» et compte «plus de 150 talents», dont la star du basket-ball Rudy Gobert, mais aussi pléthore de personnalités des mondes de la musique, de l’influence ou encore du cinéma. Tout l’enjeu pour ce genre de plateformes, qui ne sont régulées ni par l’Autorité des marchés financiers (AMF) ni par l’autorité nationale des jeux (ANJ), est de réussir à garantir la confiance des potentiels investisseurs sur des actifs dont le potentiel de rentabilité reste encore très incertain. «La régulation n’est pas là pour contraindre mais pour donner un cadre qui permette de protéger les investisseurs et les professionnels» afin d’éviter «d’amener à un nouveau FTX», souligne Vincent Couroyer, président de la commission innovation/fintech de la Chambre nationale des conseils en gestion de patrimoine, en référence à la récente implosion de la plateforme américaine d’échanges de cryptomonnaies. «C’est aussi une forme de reconnaissance pour les plateformes de trading en ligne, qui leur permet de dire qu’ils sont des professionnels qui respectent des règles établies par l’administration», ajoute-t-il. «On n’est ni dans une logique de paris ni d’investissement «crypto»», affirme Andrea Bonapersona de Trendex. «Si on peut trouver un cadre juridique clair dans lequel se positionner, on le fera». «On s’est fixé pour objectif d’être régulé d’ici la fin de l’année 2023», renchérit Christophe Vattier, le patron de Royaltiz.