Pour le patron de Pathé, le cinéma français doit se faire «plus spectaculaire»

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Pour renouer avec le succès à l’international, le cinéma français doit se faire «plus spectaculaire», prescrit l’un des dirigeants les plus puissants du secteur, le président de Pathé Films, qui prépare notamment le prochain «Astérix». En attendant, c’est avec un film bien plus modeste qu’Ardavan Safaee espère créer la surprise aux prochains Oscars: «Coda», un film indépendant américain, remake de «La Famille Bélier» d’Eric Lartigau avec Louanne. Le film, qui relate l’histoire d’une famille sourde en difficulté, vole de succès en succès depuis sa présentation l’an dernier au festival de Sundance, puis sa sortie sur Apple TV+. Il a remporté fin février le premier prix des SAG Awards, qui pèsent généralement lourd dans la course aux Oscars, remis le 28 mars. «Coda» met en scène des acteurs sourds ou malentendants, dont Marlee Marlin, première actrice sourde à avoir reçu un Oscar, et est nommé dans les catégories «meilleur film», «meilleur scénario adapté» et «meilleur rôle secondaire» pour Troy Kotsur. Un signe que le cinéma français et ses créateurs comptent toujours, notamment à l’étranger ? «Les films tels qu’on les a conçus jusqu’à il y a peu de temps en France – cette masse de film de 300 par an, voire plus en 2021 – n’est pas viable à long terme», estime Ardavan Safaee. «Il faut qu’on redéfinisse le type de films qu’on veut faire pour le cinéma, essayer de monter en gamme, et ça demande d’être un peu plus rares, tout en gardant une diversité», ajoute-t-il. «Pour donner envie au public, il faut faire des films plus spectaculaires.On sait le faire», assure-t-il, citant «Notre-Dame brûle» de Jean-Jacques Annaud, en salles depuis mercredi, mais aussi ses projets en cours. Parmi eux, l’une des plus grosses productions du moment (plus de 60 millions d’euros), «Astérix et Obélix: l’Empire du milieu» (sortie en février 2023), avec notamment la star du foot Zlatan Ibrahimovic aux côtés de Guillaume Canet, Gilles Lellouche en Obélix ou Marion Cotillard, mais aussi «Les Trois Mousquetaires», nouvelle adaptation de l’oeuvre d’Alexandre Dumas avec Vincent Cassel et Eva Green dans les rôles principaux, en cours de tournage. Malgré les récents accords sur la réforme de la chronologie des médias et le financement du cinéma par les plateformes, le dirigeant estime que l’écosystème français n’est pas forcément tiré d’affaire. «L’équilibre n’est pas encore bon», juge-t-il. «La manière de consommer les films a changé. Si on ne fait rien, j’ai peur que, dans dix ans, on se dise qu’on est passé en dessous de nos voisins» européens. «Ils sont moins protégés, le parc de cinémas en Espagne est dévasté, ce n’est pas terrible en Italie… Mais il y a un peu plus d’agilité et de business fait avec les plateformes pour investir dans les séries», analyse-t-il. «La contrepartie, c’est que les films espagnols en salles ne sont pas du tout au niveau», convient-il. «Pour le moment, l’équilibre fonctionne en France mais, si on laisse les plateformes grandir (…), si on n’adapte pas notre façon de produire, et les types de films qu’on fait pour la salle, on risque de prendre du retard», met-il en garde.